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L’Exposition universelle de 1889 : le règne du fer

PRÉPARATION DES PROJETS D’EXÉCUTION DU CHANTIER DE L’EXPOSITION UNIVERSELLE DE 1889

Principes généraux adoptés pour la Construction

Pour élever dans le peu de temps dont ils disposaient les immenses constructions dont ils avaient la charge, les organisateurs de l’Exposition de 1889 n’avaient évidemment pas un choix de matériaux bien étendu. Le fer s’imposait à eux, car seul il se prêtait à une exécution rapide. Aussi, dès les premiers instants, songea-t-on à l’utiliser pour l’ossature tout entière, laissant à la charpente en bois et à la pierre de taille un rôle extrêmement modeste.

CONSTRUCTIONS MÉTALLIQUES SUR LE CHANTIER DE L’EXPOSITION UNIVERSELLE DE 1889

L’art de la charpente métallique, qui n’existait pas il y a un siècle, a pris naissance le jour où l’industrie métallurgique, abandonnant ses anciens procédés de production, substitua le laminage au forgeage dans la fabrication des fers du commerce et des fers profilés.

Ses progrès, très rapides, ont suivi une marche constante, dont chacune de nos grandes Expositions internationales a marqué une étape nouvelle, accusant chaque fois des perfectionnements dans la fabrication et augmentant l’importance attribuée aux constructions métalliques. Ces progrès se caractérisaient surtout par une tendance de plus en plus prononcée à réduire au strict minimum l’emploi des pièces de forge et les soudures.

La Tour Eiffel
photo credit: MademoiselleBoleyn

En 1855, les grandes fermes en arc du Palais de l’Industrie, édifiées sur les plans et sous la direction de Barrault, produisirent la plus vive impression de grandeur sur ceux qui pénétraient pour la première fois sous une nef toute métallique de près de 50 mètres d’ouverture. Les pièces rivées, qui entraient pour une part importante dans l’ossature de cette immense nef, continuaient cependant à subir dans leur fabrication, au point de vue de la forme et des assemblages, des façons coûteuses comme main-d’oeuvre et travail de forge.

De 1855 à 1867 et à 1878, on simplifia les profils donnés aux pièces et les dispositions pour les assembler entre elles. Les constructeurs s’attachaient déjà à diminuer le nombre des pièces de forge, des soudures, à substituer le fer à la fonte dans les ossatures où on avait cru cette matière indispensable jusque-là. C’était une innovation absolument rationnelle. Le fer se prête très bien à la construction économique de piliers ou supports rigides à grandes dimensions, destinés à servir d’appui aux parties hautes de la charpente. Il facilite leur assemblage avec les pièces voisines et leur donne à peu de frais une fixité que des dispositions compliquées et coûteuses peuvent seules assurer à là fonte. Les piliers en fer résistent beaucoup mieux que les supports en fonte aux vibrations produites sur les constructions par l’action des vents violents. Leur fabrication enfin est plus rapide, et les précautions à prendre avant le montage dans les transports, chargements, déchargements et
coltinages inévitables des pièces sont bien moindres.

Une autre tendance se manifestait dans la même période. On essayait de réduire l’importance accordée aux tirants dans la composition des fermes, principalement avec les grandes portées. C’était le premier pas vers une nouvelle amélioration : les tendeurs, tirants, bielles et entraits exigent en effet l’emploi toujours dispendieux de la forge, comportent des assemblages nécessitant un travail mécanique soigné. Toutes ces pièces forcent à des soudures qui, malgré leur perfection, sont des causes, permanentes de dangers.

Les tirants ont en outre des inconvénients propres : on ne connaît jamais leur état de tension réel, et, soit pour les soutenir, soit pour les empêcher de fléchir, on alourdit de pièces auxiliaires les parties hautes de la construction.

Les fermes de 35 mètres que M. Krantz a fait construire pour l’Exposition de 1867 réalisaient partiellement ces théories. Entièrement en fer, elles offraient un aspect de grandeur tout à fait satisfaisant, grâce au report des tirants au-dessus de la toiture, disposition qui dégageait toute la partie haute de l’édifice.

L’Exposition de 1878 attesta la continuité du progrès. Les fermes de 35 mètres abritant la galerie des Machines, étudiées par de Dion, étaient entièrement en fer et dépourvues de tirants. En même temps apparaissaient les premiers spécimens de fermes à rampants, constituées par les faces inclinées d’une poutre évidée reposant librement et simplement par ses extrémités sur deux piliers verticaux.. C’est à peine si, dans une partie relativement secondaire des constructions métalliques, les galeries de 25 mètres, on retrouvait des tirants, bielles et entraits.

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photo credit: atomicjeep

Enfin ces divers types de fermes, d’apparence légère et agréable, d’une fabrication aisée, s’étaient encore perfectionnés entre l’Exposition de 1878 et l’époque où il s’agissait de déterminer les principes généraux à adopter pour l’ossature métallique des palais de l’Exposition de .1889. Leur utilisation semblait donc indiquée si les conditions du programme le permettaient”.. De ces conditions, les principales étaient les suivantes :

Les palais devaient dépasser dans leurs dimensions tout ce qui avait été fait jusque-là, sinon en surface, du moins en hauteur. Ils devaient être exécutés dans un temps relativement restreint. Enfin, malgré le grand développement accordé au plancher des étages, on ne disposait que d’une somme inférieure à celle qui avait été attribuée en 1878 à des constructions analogues et sans plancher.

Ainsi, augmentation de poids du mètre couvert, du fait tant de la hauteur que de l’action de plus en plus énergique du vent; diminution du crédit affecté à la dépense par unité superficielle, le tout comparé aux constructions du passé : voilà ce que distinguait tout d’abord l’entreprise nouvelle et rendait le problème difficile.

Le grand nombre d’ossatures à étudier et à composer venait aussi compliquer ce problème. En 1878, on s’était trouvé en présence de sept types de fermes ayant respectivement 35, 25, 15, 12, 7 et 5 mètres d’ouverture.

Dans le cas actuel, il s’agissait d’en-définir et composer onze avec des ouvertures variant entre 114, 51, 30, 25 et 15 mètres. Des solutions nouvelles, jointes aune exécution matérielle plus simple des éléments entrant dans la composition des ossatures, permettaient seules d’obtenir, sans dépasser les limites d’argent et de temps imposées, un résultat satisfaisant au point de vue de la forme et de la sécurité.

On est en conséquence parti de cette idée, que la construction devait être la réalisation d’hypothèses simples, et par suite qu’il fallait s’en tenir à des formes continues et aussi peu tourmentées que possible.

On a considéré que la suppression des tirants était une nécessite sous le double rapport de l’économie et de la sécurité; on s’est attaché à composer les poutres de telle sorte que” les pièces n’exigeassent aucune inflexion, aucun travail de forge. On a admis que la construction ne devait comporter que des fers de qualité courante, coupés et assemblés dans les conditions utilisant le mieux les propriétés résistantes dues à leur mode de fabrication, et on s’est imposé la condition de ne leur faire subir aucun travail incompatible avec ces propriétés, surtout de ne les soumettre qu’à des façons dont l’exécution fût facile à contrôler et à vérifier. Cette
manière de procéder donne, il est vrai, à l’emploi des fourrures une importance plus grande que si on admet l’inflexion et le forgeage des pièces; mais elle a l’avantage de diminuer singulièrement le prix unitaire de la matière et d’augmenter la rigidité des assemblages.

Dans les trois groupes de Palais de la future Exposition on retrouve des applications de ces principes généraux.

Dispositions spéciales au Palais des Machines.

Le Palais des Machines comportait l’établissement, dans des conditions de prix déterminé au mètre carré couvert, de fermes de 115 mètres d’ouverture offrant toutes garanties au point de vue de la sécurité. La réalisation de ces deux conditions présentait différentes difficultés. Les formules de résistance à appliquer aux poutres courbes supposent dans la courbure de la fibre moyenne et dans les variations que peuvent subir les sections transversales, une continuité facile à obtenir pour les poutres des ponts, mais incompatible avec l’effet architectural qu’on désirait assurer à la construction. Elles réclament pour les appuis une fixité que le sol tourmenté du Palais des Machines ne permettait pas de garantir. D’autre part, la question d’économie exigeait un emploi strict de la matière d’après les besoins de la résistance mise en jeu dans chaque section, et les calculs ne pouvaient pas assurer cette répartition d’une façon certaine.

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Un seul mode de construction produisait une détermination mathématique de la répartition des efforts dans les différentes sections de l’arc : c’était celui désarticulations sur les appuis et au sommet. Ce système, en supprimant la continuité au sommet, provoque dans les sections des efforts dépassant un peu ceux qui correspondent à l’hypothèse de la continuité; mais il garantit une distribution rationnelle absolument rigoureuse des efforts et de la matière employée. On a, pour cette raison, constitué la ferme; en faisant buter l’une contre l’autre deux véritables volées de grues articulées à leurs pieds, et s’appuyant l’une sur l’autre grâce à un troisième tourillon d’articulation placé au sommet.

La poussée un peu plus forte qui résulte de ce système n’occasionne qu’un excédent de dépense insignifiant, et la disposition, transformant les appuis en véritables culées de ponts est économique et pratique en ce qu’on n’a pas à faire usage des tirants. Aux considérations d’aspect architectural et de sécurité développées plus haut sur l’intérêt de la suppression de ces pièces, il faut ajouter que, dans le cas du Palais des Machines, pour équilibrer la poussée de 120000 kilog. qui se produit par instant, on eût été conduit à employer un tirant d’une section nette de près de 30 000 millimètres carrés, pesant 35000 kilog., sans compter les manchons, couvre-joints, pièces de jonction et appareils de tension. La construction de ce tirant aurait représenté une dépense de 15 à 18000 francs. Or la valeur moyenne des culées établies ne dépassait pas 8 500 francs par arc. Le rapprochement de ces chiffres montre combien il était avantageux de substituer à faction incertaine des tirants une réaction des appuis qui avait l’avantage d’être non seulement assurée, mais en outre bien moins coûteuse d’établissement. Enfin, en augmentant l’importance des appuis, on diminuait les chances de tassement dans la construction.

Le système des articulations avait un dernier avantage : celui de ne pas modifier sensiblement la. répartition intérieure des efforts moléculaires, au cas d’un léger tassement dans les fondations ou de variations de température dans le milieu où s’élève la construction. Si un tassement se produisait dans les fondations, on s’en trouvait averti par la déformation en résultant à la clef, et on pouvait y remédier sans autre préoccupation, puisque les fatigues moléculaires dans les volées ne se trouvent pas sensiblement altérées par ce fait.

Cette composition des fermes exige, par contre, un système de contreventement des travées extrêmes plus important que celui qui est nécessaire dans le cas des arcs continus pour résister aux efforts du vent dans le sens de l’axe de la construction pendant la période de montage et après sa mise en service; mais leur calcul ne présente aucune difficulté.

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photo credit: billjacobus1

Les éléments de l’ossature devaient être constitués par des fers simplement coupés, dressés, percés, ajustés à leurs extrémités et rivés les uns aux autres sans subir d’inflexions.

Les calculs ont été exécutés en vue de surcharges de neige de 50 kilog. par mètre superficiel de toiture, d’une pression de vent de 120 kilog. par mètre carré de section normale à sa direction, et, en admettant une fatigue extrême de la matière, de 9 kilog. par millimètre carré dans les points où se cumulent toutes les conditions défavorables à la résistance.

Dispositions spéciales aux Palais des Beaux-Arts et des Arts libéraux, des Galeries Rapp et Desaix.

Dans les Palais des Beaux-Arts et des Arts libéraux, on s’est inspiré des mêmes principes : laisser au fer les parties de la construction exposées à vibrer sous l’action des vents violents et à supporter de fortes charges, réserver à la fonte les parties décoratives.

Les hypothèses dont on a cherché ici la réalisation ont été encore choisies parmi les plus simples. Le profil donné à la section transversale des nefs centrales, caractérisées par une distance entre parements extérieurs des montants égale à 52m,70 et une hauteur sous clef de 28m,20, ne se prêtait pas pour le calcul des dimensions à l’application des formules se rapportant aux poutres courbes; on a composé l’ossature de chacune de ces fermes au moyen de deux grandes poutres arquées en. tôle et cornières, convenablement profilées, que l’on a fait reposer librement par leurs extrémités inférieures sur des tourillons placés dans des coussinets scellés sur les massifs de fondations, et qui viennent buter l’une contre l’autre, à leur sommet, par l’intermédiaire d’un troisième axe d’articulation. On aurait pu, par une disposition convenable des fondations, équilibrer la poussée dans les fermes sans intervention de tirants ; mais la condition d’établir des caves contre les pieds droits de ces fermes n’ayant pas permis de donner aux fondations les dimensions appropriées pour produire cet effet, on a été obligé de recourir à l’emploi de tirants, placés et dissimulés sous le sol.

Ici encore, le principe était de ne faire subir aux fers que des façons simples. En même temps, pour éviter l’emploi des larges plats dans l’établissement des profils transversaux et réduire ainsi la dépense, on jumelait les fermes, ce qui assurait, dans de bonnes conditions, leur résistance aux efforts de compression supportés par les plates-bandes.

Cette dernière disposition était, en outre, justifiée par une autre considération. En voulant donner aux rampants des fermes l’aspect de poutres courbes à simples treillis, on s’est trouvé, eu égard à la faible hauteur de là poutre et à l’importance laissée aux vides, éprouver de très grandes difficultés pour attacher les barres de treillis aux membrures par un nombre suffisant de rivets. Le doublement de la poutre diminuait de moitié l’effort subi par chaque barre et permettait de substituer, sans aucun inconvénient, le treillis simple au treillis double, dont l’aspect aurait été moins satisfaisant.

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photo credit: Cane Rosso

Les Galeries latérales, les Galeries Rapp et Desaix et celles sur la Seine comprenaient des fermes à rampant constituées par des arbalétriers en poutres droites et à treillis. Pour ces fermes, la poussée était équilibrée par des tirants; mais il y avait là une exception inévitable.

La conservation, au point de vue architectural, des arbalétriers droits entraînait forcément l’existence de tirants; et, si sur ce point on était obligé d’abandonner les principes généraux adoptés, on y revenait de suite en réduisant au strict minimum l’importance des soudures dans les pièces assemblées. La construction des dômes a été établie avec les mêmes préoccupations. Pour être absolument certain des conditions de résistance des pièces de leurs ossatures, on a eu soin de ne constituer ces dernières que par des arceaux qui s’appuyaient à leur base sur le châssis polygonal supporté par les grands piliers verticaux et qui venaient buter librement à leur sommet contre la poutre circulaire soutenant le lanterneau. La poussée exercée par chaque arceau était équilibrée par l’intermédiaire de ceintures convenablement étudiées, et le calcul s’en effectuait facilement.

Dispositions spéciales aux Galeries des Industries diverses.

Les Galeries des Industries diverses constituaient, au point de vue de l’étendue des surfaces couvertes, le plus important des trois groupes de Palais élevés dans le Champ de Mars.

Elles comportaient la construction de fermes de 15, 25 et 30 mètres, de pavillons d’angle de grande hauteur et d’un dôme de dimensions magistrales.

L’ensemble des fermes présentait une ossature formée par de simples piliers supportant une poutre cintrée qui n’exerçait aucune poussée sur ses appuis; la membrure inférieure de cette poutre était arquée, en vue de l’effet architectural à produire; ses membrures supérieures, plus ou moins inclinées sur l’horizontale et convenablement raccordées ensemble, constituaient les rampants de la ferme. C’était l’expression la plus complète des règles exposées plus haut.

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photo credit: isado

La sécurité dans ce genre de charpente était facilement assurée. Pour qu’une pièce posée sur deux appuis n’exerce aucune poussée sur ses supports, il suffit, quand ces appuis sont de niveau, que la section milieu de la poutre et les sections intermédiaires puissent résister aux moments de flexion et aux efforts tranchants qui sont la conséquence des actions exercées par les forces dont la poutre doit subir l’effet. En donnant à chacune des sections les dimensions répondant à ces efforts, et en apppropriant le profil extérieur de la poutre au genre de couverture à supporter, la question est résolue et l’aspect satisfaisant.

Les fermes sont un peu plus lourdes que celles obtenues avec arbalétriers en poutres droites, butés les uns contre les autres et dont la poussée s’équilibre par des tirants; mais, aujourd’hui que les fermes écartées sont en faveur, le poids de la ferme n’est plus qu’une fraction de plus en plus réduite du poids total, et, si on tient compte de la composition plus avantageuse au point de vue du prix unitaire de la construction avec poutre évidée, on reconnaît que, toute compensation effectuée, cette façon de composer les ossatures offre, au point de vue de l’économie, des avantages sur la ferme à tirant.

Les pavillons de raccordement n’ont rien présenté de spécial.

Quant au dôme, il a été établi d’après les règles adoptées pour ceux des Palais des Arts, mais sur une échelle plus grande. Il comporte comme pièces essentielles d’immenses poutres arquées reposant simplement dans leurs parties inférieures sur des massifs de fondation arasés au niveau du sol, et dont les parties supérieures butent librement contre une forte couronne annulaire supportant le faîtage et une statue de grandes dimensions.

La distance très considérable qui sépare la couronne et les appuis sur le sol rend les poussées relativement faibles; elles sont équilibrées, dès qu’on arrive au sommet de la partie prismatique du dôme, par les ceintures métalliques qui réunissent les poutres et servent d’appui à la couverture.

Toute la partie prismatique n’a donc qu’à résister à l’action des charges verticales, et se présente, de ce fait, dans d’excellentes conditions pour le calcul de ses dimensions.

Tel est dans ses lignes générales le programme adopté pour les constructions métalliques de l’Exposition de 1889.

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source :

Titre : Exposition universelle internationale de 1889 à Paris. Monographie. Palais, jardins, constructions diverses, installations générales, par A. Alphand,… avec le concours de M. Georges Berger,… Publication achevée sous la direction de M. Alfred Picard,… accompagnée d’un atlas de 219 planches. Tome 1

Auteur : Berger, Georges (1834-1910)

Auteur : Alphand, Adolphe (1817-1891)

Éditeur : J. Rothschild (Paris)

Date d’édition : 1892-1895

Contributeur : Exposition internationale (1889 ; Paris). Éditeur scientifique

Sujet : Paris, Exposition, 1889

Type : monographie imprimée

Langue : Français

Exposition universelle de Paris, 1889 : troisième épisode

Budget de l’exposition de 1889 et organigramme des travaux

En résumé, pour la réalisation du plan qu’il avait soumis à la Commission de contrôle et de finances, le Directeur général des Travaux disposait de 29.650.000 francs.

C’est dans cette limite qu’il a dû se renfermer.

Toutes les opérations furent conduites de manière à rester dans les crédits prévus. On commença par engager toutes les entreprises essentielles, réservant pour la fin les entreprises de décoration, auxquelles on affecta les reliquats disponibles, ce qui permit de leur donner plus ou moins de développement selon les ressources qu’on pouvait leur consacrer.

ORGANISATION DE LA DIRECTION GENERALE DES TRAVAUX

Décrets et Arrêtés. — L’emplacement de la future Exposition, les crédits nécessaires aux travaux étaient déterminés : l’organisation du service chargé de les préparer et d’en diriger l’exécution ne pouvait être retardée.

Une série de décrets parut à cet effet.

Le premier, en date du 28 juillet 1886, institue au Ministère du Commerce un service spécial.

Le Ministre du Commerce et de l’Industrie fait fonctions de Commissaire général. Il a sous ses ordres trois Directeurs, qui prennent le titre de Directeurs généraux.

La tour Eiffel
photo credit: kimdokhac

La Direction des Travaux comprend quatre services particuliers :

  • service de l’Architecture et des Travaux,

  • service des Plantations et de la Voirie,

  • service des Palais et Bâtiments spéciaux,

  • service médical.

La Direction de l’Exploitation a les attributions suivantes :

  • service des Transports,

  • service de la Section française et des Sections étrangères,

  • service mécanique et électrique,

  • service de la Police intérieure.

La Direction des Finances s’occupe des matières suivantes :

  • Comptabilité,

  • Caisse,

  • Contentieux,

  • service du Matériel et des Entrées.

Le Commissariat général se réserve

  • les questions de Personnel,

  • les nominations de Commissions et de Jurys,

  • les rapports avec les Pouvoirs publics et l’Étranger,

  • la Presse,

  • le Grand-Conseil de l’Exposition,

  • la Commission de Contrôle et de Finances,

  • les règlements généraux et les affaires ne se rattachant pas spécialement à une Direction.

Les Directeurs généraux reçoivent les instructions du Ministre pour les mesures à prendre et sont responsables de l’exécution. Ils ne peuvent engager de dépenses sans une autorisation écrite du Ministre. Mais ils peuvent, clans la limite des crédits ouverts, conclure tous marchés ne s’élevant pas au-dessus de 1 500 francs.

End of the world!
photo credit: Alarzy

Chaque semaine, le Ministre réunit en comité administratif les Directeurs généraux et le Directeur du Cabinet et du Personnel au Ministère du Commerce, pour entendre les rapports des Directeurs et étudier les questions présentées. Chaque semaine également, les Directeurs généraux se réunissent en conseil des Directeurs pour l’expédition des affaires courantes intéressant plusieurs services.

A la même date du 28 juillet 1886, un arrêté du Ministre désigne comme Directeurs généraux : M. Alphand, pour le service des Travaux; M. Berger, pour le service de l’Exploitation; M. Grison, pour le service des Finances.

Un arrêté en date du 28 août suivant complète l’organisation générale en instituant près du Ministre, Commissaire général, une Commission consultative de trois cents membres, dite Grand-Conseil de l’Exposition de 1889, dont la mission consiste à donner des avis sur toutes les questions rentrant clans les attributions du Commissariat général. Elle est divisée en vingt-deux Commissions, dont la plus importante, celle des quarante-trois, a été prévue clans la convention passée avec la Société de garantie, et dont les autres, en l’absence de toute difficulté suffisamment sérieuse, n’ont pas été réunies.

En réalité, les trois Directions ont la presque totalité du travail ; contrairement à ce qui s’est passé en 1878, le Commissaire général n’a plus la direction effective de l’entreprise. La raison vient de la différence des situations. Autrefois, le Commissaire général était nommé pour la durée de l’Exposition : aujourd’hui, il ne l’est que pendant l’existence du Ministère dont il fait partie. Ce caractère d’instabilité donné aux fonctions de Commissaire général aurait eu pour conséquence d’enlever toute unité de conception et de direction dans l’exécution de l’oeuvre, si chaque Ministre eût pu imposer ses idées personnelles. La création de services généraux permanents, avec leur responsabilité propre, a remédié à ce danger et permis de donner à des hommes spéciaux l’initiative nécessaire pour mettre au service de l’intérêt général leur savoir et leur expérience reconnus.

Cette modification aux précédents sur la matière comporte une division bien nette de la part de chacun clans l’oeuvre de l’Exposition de 1889 et un historique distinct pour chaque Direction.

Le présent ouvrage sera consacré principalement à la Direction des Travaux.

Le décret du 28 juillet 1886 avait fixé de la façon suivante les attributions du Directeur général des Travaux.

Eiffel Tower reflection
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SERVICE D’ARCHITECTURE ET DES TRAVAUX DE L’EXPOSITION.

Rédaction et étude des projets, devis, cahiers des charges générales et particulières. Direction, exécution et surveillance des travaux. Règlements provisoires et définitifs. Réceptions provisoires et définitives. Délivrance des certificats de paiement pour acomptes et pour solde. Entretien des constructions. Démolition après l’Exposition. Contrôle des travaux exécutés par les concessionnaires de restaurants, cafés, chalets, kiosques, etc. Examen des projets et devis
présentés. Préparation des autorisations de concessions.

Détermination des moyens et délais d’exécution. Surveillance et contrôle des travaux autorisés. Police pendant la durée des travaux.

SERVICE DES PLANTATIONS ET DE LA VOIRIE DE L’EXPOSITION.

Plantations et jardins. Appropriation et entretien des voies, ponts, passages intérieurs et extérieurs. Eaux. Gaz. Remise en état des voies et plantations après l’Exposition. Etablissement de toutes les voies ferrées à l’intérieur de l’Exposition. Fêtes publiques. Aménagement et décoration. Préparation de la cérémonie d’ouverture et installation de la salle des récompenses.

SERVICE MÉDICAL.

Réglementation et surveillance du service médical et pharmaceutique fonctionnant au compte de l’État. Règlement des honoraires.

Ordre de service du Directeur général.

Ce décret avait imposé une lourde tâche au service des Travaux. Il s’agissait pour lui d’exécuter, dans un délai de deux ans et sur un espace restreint, plus de 30 millions d’ouvrages de toute nature; il n’y avait donc pas un instant à perdre : aussi M. Alphand, pénétré de cette nécessité, avait-il, dès les premiers jours de sa nomination, arrêté la liste de ses principaux collaborateurs et fixé par ordre de service les attributions de chacun d’eux

L’organisation adoptée dans ces circonstances dut être changée presque de suite à la mort de M. Rartet, Ingénieur en chef des ponts-et-chaussées, désigné comme Ingénieur en chef adjoint au Directeur; voici intégralement le deuxième ordre de service du 10 janvier 1887 qui régla définitivement le fonctionnement de la Direction des Travaux jusqu’aux derniers jours de son existence ainsi que la modification apportée à cet ordre de service le 15 janvier 1889.

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Source :

Titre : Exposition universelle internationale de 1889 à Paris. Monographie. Palais, jardins, constructions diverses, installations générales, par A. Alphand,… avec le concours de M. Georges Berger,… Publication achevée sous la direction de M. Alfred Picard,… accompagnée d’un atlas de 219 planches. Tome 1

Auteur : Berger, Georges (1834-1910)

Auteur : Alphand, Adolphe (1817-1891)

Éditeur : J. Rothschild (Paris)

Date d’édition : 1892-1895

Contributeur : Exposition internationale (1889 ; Paris). Éditeur scientifique

Sujet : Paris, Exposition, 1889

Type : monographie imprimée

Langue : Français

Notre épisode : l’exposition Universelle de 1889 à Paris

Les résultats du Concours d’Organisation de l’Exposition universelle de 1889

Le concours prévu par la Commission d’études eut lieu au mois de mai 1886; il donna naissance à de nombreux et remarquables projets.

Le Jury chargé du jugement décerna les prix de la manière suivante (les concurrents étant classés ex-oequo pour chaque catégorie de récompenses par ordre alphabétique) :

Trois primes de 4000 fr. à MM. Dutert, Eiffel et Sauvestre, Formigé; trois primes de 2000 francs à MM. Cassien-Bernard et Nachon, de Perthes, Raulin; six primes de 1 000 francs à MM. Ballu, Fouquiau, Jochereau et Girault, Paulin, Pierron, Vaudoyer;

Six mentions honorables à MM. Blondel, Claris et Morel, Roux, Gaston Hénard, Simil, Walwein et Bertsch-Proust.

Les premiers prix du Concours

M. Dutert avait tenu avant tout à assurer la gaîté de l’ensemble. Près des deux tiers de la surface totale de son Exposition étaient occupés par des jardins où se dressaient ça et là des constructions légères. Un immense hall destiné aux machines, matières premières et objets fabriqués, s’étendait de l’avenue de Sufiren à l’avenue de La Bourdonnais, faisant face à l’Ecole militaire. Deux séries de galeries parallèles descendaient de ses extrémités vers la Seine et se terminaient par de grands pavillons réservés aux Beaux-Arts français et étrangers. Au centre de la partie du parc qui les séparait se dressait la Tour de 300 mètres.

Tout autre était l’impression produite par le projet de MM. Eiffel et Sauvestre. La Tour de 300 mètres devenait avec eux la porte gigantesque de l’Exposition et l’un de ses principaux objets de curiosité. C’était le triomphe de l’art de l’ingénieur : les bâtiments étaient construits presque uniquement en fer, affectant la forme d’un immense fer à cheval. Le rez-de-chaussée devait abriter les machines, et 1e premier étage les groupes divers. A l’intérieur, de gracieux parterres tempéraient la sévérité de cette ceinture métallique. Au fond, un très joli pavillon, dit de l’Electricité, venait également adoucir la rudesse de l’ensemble.

Chez M. Formigô, on sentait le désir de faire constater sa réputation de dessinateur hors pair. Aucun de ses concurrents n’offrait de façade aussi étudiée, réunissant au même degré des qualités d’élégance et de grandeur. Dans les détails, une certaine analogie avec les plans de M. Dutert : môme emplacement choisi pour la Tour, les Beaux-Arts; mêmes dispositions des lignes générales et des surfaces réservées aux plantations. A côté de ces ressemblances, des différences notables dans les divisions des surfaces consacrées aux exposants. La grande galerie parallèle à l’Ecole Militaire était uniquement réservée aux Machines. Les produits français étaient nettement séparés de ceux de l’étranger, en deux séries qui fermaient les sections diverses.

Le trait commun à ces trois projets était l’affectation d’un espace plus ou moins grand aux fleurs et à la verdure.

Les second prix du Concours

Les esquisses classées en seconde ligne n’avaient, au contraire, en vue que de conserver aux exposants le plus de terrain possible.

MM. Cassien-Bernard et Nachon donnaient à leur construction la forme rectangulaire. Dans ce projet, les galeries longeant les avenues de La Bourdonnais et de Suffren devaient renfermer les Machines; le dernier côté du quadrilatère appartenait à l’exposition du Travail. A l’intérieur et* au centre, le pavillon de la “Ville de Pains, précédé et suivi de salons fermés. Enfin, comme disposition particulièrement originale, mais peu pratique, les auteurs du projet plaçaient la Tour de 300 mètres à cheval sur la Seine, en face le Palais de l’Industrie, ce palais faisant partie intégrante de l’Exposition.

M. de Perthes avait des souvenirs du plan adopté en 1878 : son projet était complet et distribuait d’une façon pratique la superficie concédée. Les Machines occupaient le même emplacement que chez MM. Cassien-Bernard et Nachon; les groupes divers venaient ensuite et s’étendaient à droite et à gauche des Beaux- Arts. La Tour se profilait à l’extrémité de l’Exposition.

M. Raulin présentait un ensemble qui se rapprochait sur certains points de celui de MM. Eiffel et Sauvestre. Le Palais du Champ de Mars, chez lui aussi, avait la forme d’un fer à chevalla Tour de 300 mètres occupait également la place d’honneur. Ce qui en faisait l’originalité, c’étaient les proportions gigantesques de la conception. La façade côté du quai comprenait deux lignes de cintres très décorés, dominant des portiques à niveau du sol qui se détachaient des flancs de la Tour; les Beaux-Arts et les Arts décoratifs étaient installés à droite et à gauche de l’entrée. Les différents produits se rangeaient par nature dans l’ordre suivant, pour former autant d’expositions circulaires et concentriques : Produits alimentaires, Matières premières, Vêtement, Mobilier; les Machines prenaient place au centre, dans l’axe delà Tour. Ce projet avait en outre utilisé d’une manière très remarquable la berge de la Seine pour la construction d’une série de pavillons destinés aux colonies, dont l’aspect vu des quais devait être très pittoresque.

Les troisième prix du Concours

Les projets classés en troisième ligne se rapprochaient de ceux qui précèdent, soit par la forme générale, soit par des détails, et réduisaient le travail de la Commission des travaux â l’étude de ceux qui ont été décrits plus haut, et parmi lesquels la Commission avait dès lors chance de trouver le plan définitif.

Présentation iconographique des diférents projets

Concours Exposition universelle 1889 : projet Formigé

Concours Exposition universelle 1889 : projet Formigé

Concours Exposition universelle 1889 : projet Formigé plan de masse

Concours Exposition universelle 1889 : projet Formigé plan de masse

Concours Exposition universelle 1889 : projet Perthes-Eiffel

Concours Exposition universelle 1889 : projet Perthes-Eiffel

Concours Exposition universelle 1889 : projet Perthes Eiffel plan de masse

Concours Exposition universelle 1889 : projet Perthes Eiffel plan de masse

Concours Exposition universelle 1889 : projet Cassien-Bernard

Concours Exposition universelle 1889 : projet Cassien-Bernard

Concours Exposition universelle 1889 : projet Cassien-Bernard plan de masse

Concours Exposition universelle 1889 : projet Cassien-Bernard plan de masse

Concours Exposition universelle 1889 : projet Raullin

Concours Exposition universelle 1889 : projet Raullin

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Source :

Titre : Exposition universelle internationale de 1889 à Paris. Monographie. Palais, jardins, constructions diverses, installations générales, par A. Alphand,… avec le concours de M. Georges Berger,… Publication achevée sous la direction de M. Alfred Picard,… accompagnée d’un atlas de 219 planches. Tome 1

Auteur : Berger, Georges (1834-1910)

Auteur : Alphand, Adolphe (1817-1891)

Éditeur : J. Rothschild (Paris)

Date d’édition : 1892-1895

Contributeur : Exposition internationale (1889 ; Paris). Éditeur scientifique

Sujet : Paris, Exposition, 1889

Type : monographie imprimée

Langue : Français

L’exposition universelle de Paris 1889

Première partie : le choix du lieu de l’exposition universelle de Paris 1889

Six ans se seront bientôt écoulés depuis que l’Exposition universelle internationale de 1889 a fermé ses portes. Cependant les mémorables assises du Centenaire de la Révolution française semblent dater d’hier. Le souvenir en est resté aussi vivace, L’admiration aussi ardente.

Projet exposition universelle de 1889 à Paris

Projet exposition universelle de 1889 à Paris

C’est qu’il eut été impossible de rêver un cadre plus merveilleux, une organisation plus habile, un succès plus éclatant.

Parmi les hommes éminents, parmi les patriotes qui ont ainsi ajouté une page glorieuse à l’histoire du pays, l’illustre Alphand se détache au premier plan.

Directeur des travaux de Paris, il avait consacré tout son génie à l’embellissement et à l’assainissement de la capitale, devenue sous sa main puissante la plus jolie ville du monde. Sa réputation d’ingénieur et d’administrateur était indiscutée par delà les frontières comme en France.

La Direction générale des travaux de l’Exposition, en donnant une consécration définitive à ses talents, l’a fait entrer dans l’immortalité.

Autre projet pour l'exposition universelle de 1889

Autre projet pour l’exposition universelle de 1889

Dès 1889, Alphand avait commencé une monographie de son oeuvre du Centenaire. Mais la maladie vint le surprendre et le terrasser à l’heure même où il pouvait compter sur quelques loisirs pour achever cette monographie.

M. Jules Roche, alors Ministre du Commerce, de l’Industrie et des Colonies, désireux de rendre un suprême hommage au grand citoyen disparu, décida la continuation de l’ouvrage entrepris par ses soins et demanda au Rapporteur général de l’Exposition d’assumer cette tâche. Il y avait là un

devoir pieux à remplir; toute hésitation de ma part eût été impardonnable. Mon rôle, fort modeste, a été de recueillir les notes et les dessins préparés par les collaborateurs d’Alphand et réunis par son adjoint dévoué, M. Délions, puis de les compléter et d’en assurer la publication. J’y ai pourvu avec le concours intelligent et assidu de 31. Eugène Hénard, architecte diplômé par le Gouvernement.

Bien que les travaux proprement dits constituent le fond même de ce livre et de l’album auquel il sert de commentaire, une place a été néanmoins réservée aux installations, qui relevaient de M. Georges Berger, Directeur général de l’exploitation, et notamment aux installations mécaniques.

Sauf de légères retouches et une mise au point, le texte n’est autre que celui des rapports fournis par les ingénieurs et architectes.

Malgré les soins de M. Hénard et les miens, la publication n’est sans doute pas ce que l’eût faite l’auteur des magnifiques palais du Champ de Mars. Elle donnera, du moins, des renseignements utiles pour l’avenir ; elle sera aussi un monument élevé à la mémoire de celui qui a jeté tant de
lustre sur la patrie française.

Autre projet pour l'exposition universelle de Paris 1889

Autre projet pour l’exposition universelle de Paris 1889

PÉRIODE D’ORGANISATION

CHAPITRE PREMIER

PRÉLIMINAIRES DE L’EXPOSITION

L — Considérations générales

L appartenait au Gouvernement de la République Française de célébrer d’une façon grandiose le Centenaire de 1789, et de proportionner l’éclat des fêtes à la gloire des souvenirs qu’elles devaient évoquer.
L’organisation d’une Exposition universelle se présentait en première ligne comme la solennité la plus capable de s imposer à l’attention de tous et de servir d’appui aux autres fêtes ayant un caractère politique. C’était le moyen le plus efficace d appeler toutes les nations du monde à se réunir dans un esprit de concorde, de tolérance mutuelle et de sympathie réciproque; Par les soins de ce dernier, les points les plus importants du programme avaient été déterminés et n’attendaient plus que
l’approbation des pouvoirs publics.

Ce programme comportait essentiellement :
1° Le choix d’un emplacement;

2.° L’étude des dispositions à adopter et la rédaction d’un avant-projet devant servir de base au concours à ouvrir ultérieurement pour les constructions;

3° L’examen de l’opportunité de la constitution d’un capital de garantie et de l’importance qu’il convenait de réserver, dans cette entreprise, à l’action gouvernementale et à l’action privée.
Ce sont ces points que nous allons maintenant examiner.

II — Choix d’un emplacement. —

La Commission d’études s’était à cet égard trouvée en présence d’une série de propositions
complexes.

La liste dressée par le ministère du Commerce comprenait douze emplacements principaux offrant chacun des avantages différents : 1° Courbevoie; 2° Vincennes; 3° Saint-Ouen; 4° Levallois-
Perret; 5° Aubervilliers ; 6° Bagatelle; 7° Pré-Catelan; 8° La Muette; 9° Champ de Mars et Grenelle; 10° Palais de l’Industrie et Champ de Mars; 11° Jardin des Tuileries; 12° Issy.

Mais le choix put être immédiatement circonscrit par suite de La question préalable qui fut posée au début des délibérations de la Commission : L’Exposition de 1889 devra-t-elle être placée clans
l’enceinte ou hors de Paris?

Au point de vue de la population parisienne, il n’y avait pas d’hésitation possible.

Organiser une exposition hors Paris, disait Viollet-le-Duc en 1878, c’est rendre la visite de ce qu’elle renferme longue et onéreuse, c’est priver une partie de la population des visites fréquentes qu’elle pourrait y faire. Nous ne devons pas oublier, ajoutait l’éminent rapporteur delà Commission de 1878, que si les Expositions universelles attirent un grand nombre d’oisifs, de curieux, d’étrangers riches et qui peuvent disposer de leur temps, elles sont chez nous très populaires, deviennent un précieux sujet d’études; que nos artisans, nos ouvriers doivent pouvoir les visiter longuement et fréquemment, sans perdre un temps utile en longues courses, et sans être obligés de dépenser beaucoup.

PRÉLIMINAIRES DE L’EXPOSITION.

A Paris, une Exposition produit à ce point de vue un changement sensible clans l’existence des travailleurs. Le mal eût été infiniment plus grave dans une population d’importance relative-
ment faible.

Ces raisons déterminèrent la Commission. Malgré le caractère séduisant de certains projets, et notamment de celui de Courbevoie, qui terminait la belle perspective de l’avenue de la Grande-Armée par un monument dédié à la Paix, il fut décidé que, comme en 1878 l’Exposition aurait lieu dans l’intérieur de Paris.

Cette première résolution en amenait presque nécessairement une seconde, la désignation du Champ de Mars, avec des annexes plus ou moins considérables. En effet, le jardin des Tuileries manquait d’étendue; quant à l’emplacement de Grenelle, il supposait l’expropriation de toute la zone comprise entre le quai de Grenelle, le boulevard de Grenelle et l’avenue de La Motte-Piquét.

Restait donc le Champ de Mars, c’est-à-dire : 1° Sur la rive gauche, le Champ de Mars proprement dit, le quai d’Orsay et les bas ports entre l’avenue de La Bourdonnais et le ministère des Affaires étrangères, y compris l’esplanade des Invalides; 2° Sur la rive droite, le Trocadéro relié par le pont d’Iéna, les Champs-Elysées depuis l’avenue d’An tin jusqu’à l’avenue qui limite le Palais de l’Industrie du côté de la place de la Concorde, y compris le Palais de l’Industrie. Ces dernières surfaces devaient se rattacher à la rive gauche par un pont doublant celui des Invalides.

Dans la pensée de la Commission, et ainsi que l’avait demandé le Conseil municipal, les concours et expériences agricoles exigeant un grand développement devaient avoir lieu à Yincennes.

La surface utilisable, pour la partie seule désignée à l’intérieur de Paris, était beaucoup plus
importante que celle qui avait été affectée aux Expositions de 1867 et de 1878. L’Exposition de 1889 occupait donc une surface supérieure de 270737 mètres, soit de 39 % à celle de 1867, et de 213037 mètres, soit de 28%, à celle de 1878.

IV. — Conditions auxquelles le Champ de Mars a été mis à la disposition de l’Exposition.

Les décisions de la Commission consultative devaient, en ce qui concernait le choix d’un emplacement, être ratifiées par le ministre du Commerce, et recevoir plus tard une exécution presque complète.

L autorité militaire avait consenti à l’occupation du Champ de Mars, mais à la condition qu’un champ de manoeuvres pour la cavalerie lui serait attribué. Elle songea tout naturellement à demander le champ d’entraînement de Bagatelle, qui lui avait déjà été prêté en 1878. Un accord intervint à ce sujet avec la Yille de Paris, et l’emplacement fut accordé sous les réserves suivantes :

1° Pendant toute la durée de l’occupation, l’État paierait à la Yille de Paris, pour les dégradations résultant du passage des troupes sur les routes du Bois de Boulogne, une indemnité de 8 000 francs par semestre (l’Exposition paya de ce chef 48 000 francs à la Yille de Paris).

2° Lorsque l’occupation aurait pris fin, les frais de remise en état du champ d’entraînement seraient supportés par l’Etat.

A ces conditions, imposées par la Ville de Paris, vint s’en ajouter une autre réclamée par le ministère de la Guerre au ministère du Commerce, à savoir que les installations provisoires nécessaires pour compléter l’organisation du champ de manoeuvres seraient exécutées aux frais de l’Exposition.

Projet et tour pour l'exposition universelle de Paris 1889

Projet et tour pour l’exposition universelle de Paris 1889

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Source :

Titre : Exposition universelle internationale de 1889 à Paris. Monographie. Palais, jardins, constructions diverses, installations générales, par A. Alphand,… avec le concours de M. Georges Berger,… Publication achevée sous la direction de M. Alfred Picard,… accompagnée d’un atlas de 219 planches. Tome 1

Auteur : Berger, Georges (1834-1910)

Auteur : Alphand, Adolphe (1817-1891)

Éditeur : J. Rothschild (Paris)

Date d’édition : 1892-1895

Contributeur : Exposition internationale (1889 ; Paris). Éditeur scientifique

Sujet : Paris, Exposition, 1889

Type : monographie imprimée

Langue : Français

Format : 2 tomes en 1 vol. gr. in-8°

Exposition universelle de Paris, 1878

Présentation de l’Exposition universelle de Paris (1878) en chanson

L’EXPOSITION UNIVERSELLE DE 1878
Par BALLANDE-FOUGEDOIRE.

Thiers, mars 1877

AIR : Toute l’Europe est sous les armes.

La France vient d’être éprouvée
Vendue par ses meilleurs amis,
Son industrie est approuvée
Même par ses plus ennemis.
Malgré ces terribles épreuves
Rien n’appauvrit sa position.
Nous allons en donner des preuves
Dans notre grande exposition, (bis).

REFRAIN

Paris la grande capitale.
Riche berceau de l’industrie,
Tu fais l’espoir de la Patrie,
Ecoute-moi bien, je l’en prie,
Paris, la cité sans rivale
Le monde en convient aujourd’hui, oui.

Nous allons voir l’année prochaine,
Ces couplets sont faits à propos,
Transformer les bords de la Seine,
En des immenses entrepôts ;
C’est une Exposition nouvelle
Le paysan, l’artiste, l’ouvrier,
Dans cette occasion solennelle.
Chacun veut passer le premier (bis)

Paris, etc..

Toutes les grandes industries
Préparent leurs échantillons,
La France avec ses colonies
Vient de voter deux cents millions ;
On ne parle plus politique.
Dans tous les meilleurs ateliers
Chaque directeur de fabrique
À l’oeil ouvert sur ses ouvriers, (bis)

Paris, etc..

De toutes les parties du monde
Tous les peuples les plus actifs,
Depuis Arcangel à Golconde,
Chacun fait ses préparatifs,
Pour visiter la Capitale.
Partout ça n’est qu’un parti pris,
L’un fait son sac, l’autre sa malle
Et prend le chemin de Paris, (bis)

Paris, etc..

Rien loin de se faire la guerre,
Chacun donne preuve d’esprit,
Tous les fabricants de la terre
Tournent leurs regards sur Paris.
Chacun en comprend l’importance,
Tout le monde sans exception
Se prépare à venir en France,
Prendre part â l’exposition. (bis).

Paris, etc..

Nous savons que l’industrie gagne
Dans toutes les expositions ;
Nous ignorons si l’Allemagne
Partagera nos intentions,
Qu’ils viennent donc avec confiance,
Du reste ils s’en sont aperçut,
Ils savent que chez nous, en France,
Les étrangers sont bien reçus, (bis).

Paris, etc..

Tous leurs produits comme les autres,
Seront sous notre protection.
Ils seront à cota des nôtres,
Nous leurs porterons attention ;
Nous n’aurons pas la platitude
De mettre leurs biens en danger,
Nous aurons comme d’habitude
Tout égard pour les étrangers, (bis):

Paris, etc.

Les peuples n’ont plus besoins d’armes,
Les hommes n’ont qu’un seul parti.
Vous avez fait verser des larmes,
Tyrans, vôtre règne est fini
On vous le dit, sauvez vous vite,
Vous êtes de mauvaise foi ;
Nous voulons respecter ensuite,
Ceux qui représentent la loi. (bis)

Paris, etc…

Ne fabriquons plus de mitraille,
Travaillons tous pour l’industrie
Mais ne livrons plus de bataille,
Supprimons cette barbarie,
N’ayons plus l’esprit de conquêtes,
Ça donne des mauvais renoms,
Ne forgeons plus de baïonnettes
Et ne fondons plus de canons, (bis).

Paris, etc.

Sauvez-vous, rendez-vous bien compte,
Je vous le répète aujourd’hui,
Vous mangez, vous n’avez pas honte,
Vous n’avez jamais rien produit.
Vous le savez, j’aime la France,
Je ne pense pas comme vous ;
Si la vérité vous offense,
Allez vivre à cent lieues de nous, (bis)

Paris, etc.

Suivons les lois de la nature,
Dieu nous créa pour être heureux,
Travaillons pour l’agriculture,
Nous ne serons pas malheureux ,
Travaillons pour les Républiques
Tout le monde nous aimera.
Faisons du drap des mécaniques
Et le bon Dieu nous bénira (bis).


Paris, etc.

phono cylindre - 007
photo credit: phonogalerie.com

 

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Source :

Titre : L’Exposition universelle de 1878, par Ballande-Fougedoire

Auteur : Ballande-Fougedoire, Pierre

Éditeur : impr. de Grandsaigne (Thiers)

Date d’édition : 1877

Type : monographie imprimée

Langue : Français

Format : In-fol. plano

BNF