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La publicité sous la Restauration en France (1814-1830) -II-

HISTOIRE DE LA GRANDEUR ET DE LA DÉCADENCE DE

CÉSAR BIROTTEAU – Présentation de la fameuse

“Huile céphalique”

Toujours dans le même roman Balzac présente un second prospectus publicitaire émis par un des personnages du roman : Popinot.

“– Monsieur, dit Popinot, un prospectus est souvent toute une fortune.

— Et souvent, dit Andoche, la fortune n’est qu’un prospectus.

— Ah ! très-joli, dit Gaudissart. Ce farceur d’Andoche a de l’esprit comme les quarante.

— Comme cent, dit Popinot stupéfait de cette idée.

L’impatient Gaudissart prit le manuscrit et lut à haute voix et avec emphase : Huile Céphalique !

— J’aimerais mieux Huile Césarienne, dit Popinot.

— Mon ami, dit Gaudissart, tu ne connais pas les gens de province : il y a une opération chirurgicale qui porte ce nom-là, et ils sont si bêtes qu’ils croiraient ton huile propre à faciliter les accouchements ; et de là pour les ramener aux cheveux, il y aurait trop de tirage.

— Sans vouloir défendre mon mot, dit l’auteur, je vous ferai observer que Huile Céphalique veut dire huile pour la tête, et résume vos idées.

— Voyons ? dit Popinot impatient.

Voici le prospectus tel que le commerce le reçoit par milliers encore aujourd’hui. (Autre pièce justificative.)

MEDAILLE D’OR A L’EXPOSITION DE 1819.

HUILE CEPHALIQUE.

BREVETS D’INVENTION ET DE PERFECTIONNEMENT.

Nul cosmétique ne peut faire croître les cheveux, de même que nulle préparation chimique ne les teint sans danger pour le siége de l’intelligence. La science a déclaré récemment que les cheveux étaient une substance morte, et que nul agent ne peut les empêcher de tomber ni de blanchir. Pour prévenir la Xérasie et la Calvitie, il suffit de préserver le bulbe d’où ils sortent de toute influence extérieure atmosphérique, et de maintenir à la tête la chaleur qui lui est propre. L’HUILE CEPHALIQUE, basée sur ces principes établis par l’Académie des sciences, produit cet important résultat, auquel se tenaient les anciens, les Romains, les Grecs et les nations du Nord auxquelles la chevelure était précieuse. Des recherches savantes ont démontré que les nobles, qui se distinguaient autrefois à la longueur de leurs cheveux, n’employaient pas d’autre moyen ; seulement leur procédé, habilement retrouvé par A. Popinot, inventeur de l’HUILE CEPHALIQUE, avait été perdu.

Conserver au lieu de chercher à provoquer une stimulation impossible ou nuisible sur le derme qui contient les bulbes, telle est donc la destination de l’HUILE CEPHALIQUE. En effet, cette huile, qui s’oppose à l’exfoliation des pellicules, qui exhale une odeur suave, et qui, par les substances dont elle est composée, dans lesquelles entre comme principal élément l’essence de noisette, empêche toute action de l’air extérieur sur les têtes, prévient ainsi les rhumes, le coryza, et toutes les affections douloureuses de l’encéphale en lui laissant sa température intérieure. De cette manière, les bulbes qui contiennent les liqueurs génératrices des cheveux ne sont jamais saisies ni par le froid, ni par le chaud. La chevelure, ce produit magnifique, à laquelle hommes et femmes attachent tant de prix, conserve alors, jusque dans l’âge avancé de la personne qui se sert de l’HUILE CEPHALIQUE, ce brillant, cette finesse, ce lustre qui rendent si charmantes les têtes des enfants.

LA MANIERE DE S’EN SERVIR est jointe à chaque flacon et lui sert d’enveloppe.

MANIERE DE SE SERVIR DE L’HUILE CEPHALIQUE.

Il est tout a fait inutile d’oindre les cheveux ; ce n’est pas seulement un préjugé ridicule, mais encore une habitude gênante, en ce sens que le cosmétique laisse partout sa trace. Il suffit tous les matins de tremper une petite éponge fine dans l’huile, de se faire écarter les cheveux avec le peigne, d’imbiber les cheveux à leur racine de raie en raie, de manière à ce que la peau reçoive une légère couche, après avoir préalablement nettoyé la tête avec la brosse et le peigne.

Cette huile se vend par flacon, portant la signature de l’inventeur pour empêcher toute contrefaçon, et du prix de TROIS FRANCS, chez A. POPINOT, rue des Cinq-Diamants[Erreur du Furne : rue des Cinq-Diaments.], quartier des Lombards, à Paris.

ON EST PRIE D’ECRIRE FRANCO.

Nota. La maison A. Popinot tient également les huiles de la droguerie, comme néroli, huile d’aspic, huile d’amande douce, huile de cacao, huile de café, de ricin et autres. ”

HISTOIRE DE LA GRANDEUR ET DE LA DECADENCE DE CESAR BIROTTEAU
(Volume 10) Études de moeurs. Scènes de la vie parisienne. Balzac. La Condition humaine. Edition critique en ligne.
Source : La publication en mode texte de la première édition de La Comédie humaine (dite édition Furne, 1842-1855), paginée et encodée, est le fruit d’un partenariat entre le Groupe International de Recherches Balzaciennes, la Maison de Balzac (musée de la Ville de Paris) et le groupe ARTFL de l’Université de Chicago.

Thermoformage et plv

Les avantages du thermoformage dans la fabrication

d’outils de Plv

Un bon outil pour la plv : le thermoformage
Un bon outil pour la plv : le thermoformage

Le thermoformage permet d’obtenir à partir de la matière première (plastique, PVC) travaillé dans des moules des objets en semi-relief et en couleur, légers à manipuler et aisés à mettre en place. Les avantages obtenus par la technique du thermoformage dans le domaine de la plv (publicité sur lieu de vente) :

  • relief ou semi relief de l’objet
  • grande variété de formes
  • possibilité de créer des objets en trois dimensions (3D)
  • forte attractivité au niveau visuel
  • grande résistance à l ‘usure
  • multiplicité des types d’outils de plv pouvant être créés
  • possibilité de crées des formes ou objets de grande taille.

Ce type de support PLV n’est pas très développé en France ; on le trouve essentiellement dans les pharmacies où il sert à la reproduction d’objets comme des tubes ou des boîtes. Il serait intéressant de développer son usage car le thermoformage est réellement polyvalent et d’un prix très abordable. Il convient pour amortir les coûts (mise en place du visuel, création des moules, de prévoir des séries conséquentes, le prix unitaire étant par nature peu elevé).

Quelques outils de plv thermoformés

Voici une liste non limitative de catégories d’objets thermoformés pouvant servir pour une campagne de publicité :

  • calendrier publicitaire
  • cartes en relief
  • chevalet de comptoir en plastique
  • chevalet de vitrine en plastique
  • tableaux d’affichage ou tableaux d’écriture
  • présentoir de comptoir
  • présentoir de sol
  • étiquettes promotionnelles en relief
  • totem en semi-relief
  • horloges publicitaires
  • enseignes lumineuses intérieures
  • présentoirs de comptoir en plastique
  • tableau de prix
  • masques
  • goodies promotionnels
  • mobiles publicitaires en semi-relief
  • stop-trottoir publicitaire
  • demi-sphère (ballon, boule, oeuf, globe, etc …)
  • reproduction d’objets en 3d (tubes, bouteilles, boîtes, etc …)
  • changeur de monnaie
  • assiettes publicitaires
  • panneau d’affichage publicitaire en semi-relief
  • réglette de linéaire ou réglette de comptoir
  • thermomètre extérieur publicitaire
  • panneau d’affichage horaires d’ouverture et de fermeture
  • stop-comptoir.

Comme vous le voyez à la lecture de la liste la possibilité de créer un outil plv est presque illimité.

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Une réglette publicitaire en 3D
Une réglette publicitaire en 3D

La publicité sous la Restauration en France (1814-1830)

César Birotteau fait campagne publicitaire

pour la”DOUBLE PATE DES SULTANES ET EAU

CARMINATIVE”

honore-de-balzac

Poursuivant notre étude des textes des grands auteurs présentant tel ou tel aspect du commerce ou de la publicité il ne nous était pas possible d’ignorer BALZAC qui décrivit dans plusieurs de ses romans tel ou tel aspect de la France commerciale et industrielle de la première moitié du XIXe siècle.

L’extrait qui suit provient du roman : HISTOIRE DE LA GRANDEUR ET DE LA DÉCADENCE DE CÉSAR BIROTTEAU. On notera que les préoccupations de César Biroteau en matière de publicité comme dans le domaine de la lutte contre la contrefaçon sont très contemporaines.

” Birotteau appela ce cosmétique la Double Pâte des Sultanes. Afin de compléter l’oeuvre, il appliqua le procédé de la pâte pour les mains à une eau pour le teint qu’il nomma l’Eau Carminative. Il imita dans sa partie le système du Petit-Matelot, il déploya, le premier d’entre les parfumeurs, ce luxe d’affiches, d’annonces et de moyens de publication que l’on nomme peut-être injustement charlatanisme. La Pâte des Sultanes et l’Eau Carminative se produisirent dans l’univers galant et commercial par des affiches coloriées, en tête desquelles étaient ces mots : Approuvées par l’Institut ! Cette formule, employée pour la première fois, eut un effet magique. Non-seulement la France, mais le continent fut pavoisé d’affiches jaunes, rouges, bleues, par le souverain de la Reine des Roses qui tenait, fournissait et fabriquait, à des prix modérés, tout ce qui concernait sa partie. A une époque où l’on ne parlait que de l’Orient, nommer un cosmétique quelconque Pâte des Sultanes, en devinant la magie exercée par ces mots dans un pays où tout homme tient autant à être sultan que la femme à devenir sultane, était une inspiration qui pouvait venir à un homme ordinaire comme à un homme d’esprit ; mais le public jugeant toujours les résultats, Birotteau passa d’autant plus pour un homme supérieur, commercialement parlant, qu’il rédigea lui-même un prospectus dont la ridicule phraséologie fut un élément de succès : en France, on ne rit que des choses et des hommes dont on s’occupe, et personne ne s’occupe de ce qui ne réussit point. Quoique Birotteau n’eût pas joué sa bêtise, on lui donna le talent de savoir faire la bête à propos. Il s’est retrouvé, non sans peine, un exemplaire de ce prospectus dans la maison Popinot et compagnie, droguistes, rue des Lombards. Cette pièce curieuse est au nombre de celles que, dans un cercle plus élevé, les historiens intitulent pièces justificatives. La voici donc :

DOUBLE PATE DES SULTANES ET EAU CARMINATIVE
DE CESAR BIROTTEAU,
DECOUVERTE MERVEILLEUSE
APPROUVEE PAR L’INSTITUT DE  FRANCE.

Depuis long-temps une pâte pour les mains et une eau pour le visage, donnant un résultat supérieur à celui obtenu par l’Eau de Cologne dans l’oeuvre de la toilette, étaient généralement désirées par les deux sexes en Europe. Après avoir consacré de longues veilles à l’étude du derme et de l’épiderme chez les deux sexes, qui, l’un comme l’autre, attachent avec raison le plus grand prix à la douceur, à la souplesse, au brillant, au velouté de la peau, le sieur Birotteau, parfumeur avantageusement connu dans la capitale et à l’étranger, a découvert une Pâte et une Eau à juste titre nommées, dès leur apparition, merveilleuses par les élégants et par les élégantes de Paris. En effet, cette Pâte et cette Eau possèdent d’étonnantes propriétés pour agir sur la peau, sans la rider prématurément, effet immanquable des drogues employées inconsidérément jusqu’à ce jour et inventées par d’ignorantes cupidités. Cette découverte repose sur la division des tempéraments qui se rangent en deux grandes classes indiquées par la couleur de la Pâte et de l’Eau, lesquelles sont roses pour le derme et l’épiderme des personnes de constitution lymphatique, et blanches pour ceux des personnes qui jouissent d’un tempérament sanguin. Cette Pâte est nommée Pâte des Sultanes, parce que cette découverte avait déjà été faite pour le sérail par un médecin arabe. Elle a été approuvée par l’Institut sur le rapport de notre illustre chimiste VAUQUELIN, ainsi que l’Eau établie sur les principes qui ont dicté la composition de la Pâte.

Cette précieuse Pâte, qui exhale les plus doux parfums, fait donc disparaître les taches de rousseur les plus rebelles, blanchit les épidermes les plus récalcitrants, et dissipe les sueurs de la main dont se plaignent les femmes non moins que les hommes.

L’Eau carminative enlève ces légers boutons qui, dans certains moments, surviennent inopinément aux femmes, et contrarient leurs projets pour le bal, elle rafraîchit et ravive les couleurs en ouvrant ou fermant les pores selon les exigences du tempérament ; elle est si connue déjà pour arrêter les outrages du temps que beaucoup de dames l’ont, par reconnaissance, nommée L’AMIE DE LA BEAUTE.  L’eau de Cologne est purement et simplement un parfum banal sans efficacité spéciale, tandis que la Double Pâte des Sultanes et l’Eau Carminative sont deux compositions opérantes, d’une puissance motrice agissant sans danger sur les qualités internes et les secondant ; leurs odeurs essentiellement balsamiques et d’un esprit divertissant réjouissent le coeur et le cerveau admirablement, charment les idées et les réveillent ; elles sont aussi étonnantes par leur mérite que par leur simplicité ; enfin, c’est un attrait de plus offert aux femmes, et un moyen de séduction que les hommes peuvent acquérir.

L’usage journalier de l’Eau dissipe les cuissons occasionnées par le feu du rasoir ; elle préserve également les lèvres de la gerçure et les maintient rouges ; elle efface naturellement à la longue les taches de rousseur et finit par redonner du ton aux chairs. Ces effets annoncent toujours en l’homme un équilibre parfait entre les humeurs, ce qui tend à délivrer les personnes sujettes à la migraine de cette horrible maladie. Enfin, l’Eau Carminative, qui peut être employée par les femmes dans toutes leurs toilettes, prévient les affections cutanées en ne gênant pas la transpiration des tissus, tout en leur communiquant un velouté persistant.

S’adresser, franc de port, à monsieur CESAR BIROTTEAU, successeur de Ragon, ancien parfumeur de la reineMarie-Antoinette, à la Reine des Roses, rue Saint-Honoré à Paris, près la place Vendôme. Le prix du pain de Pâte est de trois livres, et celui de la bouteille est de six livres.
Monsieur César Birotteau, pour éviter toutes les contrefaçons, prévient le public que la Pâte est enveloppée d’un papier portant sa signature, et que les bouteilles ont un cachet incrusté dans le verre.”

HISTOIRE DE LA GRANDEUR ET DE LA DECADENCE DE CESAR BIROTTEAU
(Volume 10) Études de moeurs. Scènes de la vie parisienne. Balzac. La Condition humaine. Edition critique en ligne.
Source : La publication en mode texte de la première édition de La Comédie humaine (dite édition Furne, 1842-1855), paginée et encodée, est le fruit d’un partenariat entre le Groupe International de Recherches Balzaciennes, la Maison de Balzac (musée de la Ville de Paris) et le groupe ARTFL de l’Université de Chicago.

Une pharmacie sous la Monarchie de Juillet

La devanture de M. Homais et ses réclames

Autre texte célèbre de la littérature française, Madame Bovary de Gustave Flaubert présente un certain nombre de textes décrivant quelques commerces.

Le plus fameux d’entre eux est celui qui présente la devanture de la pharmacie de M. Homais à Yonville l’Abbaye au début de la seconde partie du roman.

“Mais ce qui attire le plus les yeux, c’est, en face de l’auberge du Lion d’or, la pharmacie de M. Homais ! Le soir, principalement, quand son quinquet est allumé et que les bocaux rouges et verts qui embellissent sa devanture allongent au loin, sur le sol, leurs deux clartés de couleur ; alors, à travers elles, comme dans des feux du Bengale, s’entrevoit l’ombre du pharmacien, accoudé sur son pupitre. Sa maison, du haut en bas, est placardée d’inscriptions écrites en anglaise, en ronde, en moulée : « Eaux de Vichy, de Seltz et de Barèges, robs dépuratifs, médecine Raspail, racahout des Arabes, pastilles Darcet, pâte Regnault, bandages ; bains, chocolats de santé, etc. » Et l’enseigne, qui tient toute la largeur de la boutique, porte en lettres d’or : Homais, pharmacien. Puis, au fond de la boutique, derrière les grandes balances scellées sur le comptoir, le mot laboratoire se déroule au-dessus d’une porte vitrée qui, à moitié de sa hauteur, répète encore une fois Homais, en lettres d’or, sur un fond noir.”

Gustave Flaubert. Madame Bovary. Source : www.inlibroveritas.net

Paris quotidien à la fin du XVIIeme siècle : “les embarras de Paris” de Nicolas Boileau

Paris et sa vie quotidienne commerçante, citoyenne ou chalande sous Louis XIV.

Frontispice de l'Edition des Satires

Frontispice de l’Edition des Satires

Nicolas Boileau (Année de naissance : 1636 – Lieu de naissance : Paris – Année du décès : 1711 –Lieu du décès : Paris) écrivain français trace un portrait saisissant de vie d’un quartier de Paris à la fin du House XVIIe siècle où l’on retrouve les bruits, les couleurs et les odeurs de la capitale sous le règne du roi Louis XIV.

« Qui frappe l’air, bon Dieu ! de ces lugubres cris ?
Est-ce donc pour veiller qu’on se couche à Paris ?
Et quel fâcheux démon, durant les nuits entières,
Rassemble ici les chats de toutes les gouttières ?
J’ai beau sauter du lit, plein de trouble et d’effroi,
Je pense qu’avec eux tout l’enfer est chez moi :
L’un miaule en grondant comme un tigre en furie ;
L’autre roule sa voix comme un enfant qui crie.
Ce n’est pas tout encor : les souris et les rats
Semblent, pour m’éveiller, s’entendre avec les chats,
Plus importuns pour moi, durant la nuit obscure,
Que jamais, en plein jour, ne fut l’abbé de Pure.

Tout conspire à la fois à troubler mon repos,
Et je me plains ici du moindre de mes maux :
Car à peine les coqs, commençant leur ramage,
Auront des cris aigus frappé le voisinage
Qu’un affreux serrurier, laborieux Vulcain,
Qu’éveillera bientôt l’ardente soif du gain,
Avec un fer maudit, qu’à grand bruit il apprête,
De cent coups de marteau me va fendre la tête.
J’entends déjà partout les charrettes courir,
Les maçons travailler, les boutiques s’ouvrir :
Tandis que dans les airs mille cloches émues
D’un funèbre concert font retentir les nues ;
Et, se mêlant au bruit de la grêle chicagobearsjerseyspop et des vents,
Pour honorer les morts font mourir les vivants.
Encor je bénirais la bonté souveraine,
Si le ciel à ces maux avait borné ma peine ;
Mais si, seul en mon lit, je peste avec raison,
C’est encor pis vingt fois en quittant la maison ;
En quelque endroit que j’aille, il faut fendre la presse
D’un peuple d’importuns qui fourmillent sans cesse.
L’un me heurte d’un ais dont je suis tout froissé ;
Je vois d’un autre coup mon chapeau une renversé.
Là, d’un enterrement la funèbre ordonnance
D’un pas lugubre et lent vers l’église s’avance ;
Et plus loin des laquais l’un l’autre s’agaçants,
Font aboyer les chiens et jurer les passants.
Des paveurs en ce lieu me bouchent le passage ;
Là, je trouve une croix de funeste présage,
Et des couvreurs grimpés au toit d’une maison
En font pleuvoir l’ardoise et la tuile à foison.
Là, sur une charrette une poutre branlante
Vient menaçant de loin la foule qu’elle augmente ;
Six chevaux attelés à ce fardeau pesant
Ont peine à l’émouvoir sur le pavé glissant.
D’un carrosse en tournant il accroche une roue,
Et du choc le renverse en un grand tas de boue :
Quand un autre à l’instant s’efforçant de passer,
Dans le même embarras se vient embarrasser.
Vingt carrosses bientôt arrivant à la file
Y sont en moins de rien suivis de plus de mille ;
Et, pour surcroît de maux, un sort malencontreux
Conduit en cet endroit un grand troupeau de boeufs ;
Chacun prétend passer ; l’un mugit, l’autre jure. Des mulets en sonnant augmentent le murmure.
Aussitôt cent chevaux dans la foule appelés
De l’embarras qui Lawn-Highland croit ferment les défilés,
Et partout les passants, enchaînant les brigades,
Au milieu de la paix font voir les COVER barricades.
On n’entend que des cris poussés et confusément :
Dieu, pour s’y faire ouïr, tonnerait vainement.
Moi donc, qui dois souvent en certain lieu me rendre,
Le jour déjà baissant, et qui suis las d’attendre,
Ne sachant plus tantôt à quel saint me vouer,
Je me mets au hasard de me faire rouer.
Je saute vingt ruisseaux, j’esquive, je me pousse ;
Guénaud sur son cheval en passant m’éclabousse,
Et, n’osant plus paraître en l’état où je suis,
Sans songer où je vais, je me sauve où je puis.

Tandis que dans un coin en grondant je m’essuie,
Souvent, pour m’achever, il survient une pluie :
On dirait que le ciel, qui se fond tout en eau,
Veuille inonder ces lieux d’un déluge nouveau.
Pour traverser la rue, au milieu de l’orage,
Un ais sur deux pavés forme un étroit passage ;
Le plus hardi laquais n’y marche qu’en tremblant :
Il faut pourtant passer sur ce pont chancelant ;
Et les nombreux torrents qui tombent des gouttières,
Grossissant les ruisseaux, en ont fait des rivières.
J’y commerce passe en trébuchant ; mais malgré l’embarras,
La frayeur de la nuit précipite mes pas.
Car, sitôt que du soir les ombres pacifiques
D’un double cadenas font fermer les boutiques ;
Que, retiré chez lui, le paisible marchand
Va revoir ses billets et compter son argent ;
Que dans le Marché-Neuf tout est calme et tranquille,
Les voleurs à l’instant s’emparent de la ville.
Le bois le plus funeste et le moins fréquenté
Est, au prix de Paris, un lieu de sûreté.
Malheur donc à celui qu’une affaire imprévue
Engage un peu trop tard au détour d’une rue !
Bientôt quatre bandits lui serrent les côtés :
La bourse ! … Il faut se rendre ; ou bien non, résistez,
Afin que votre mort, de tragique mémoire,
Des massacres fameux aille grossir l’histoire.
Pour moi, fermant ma porte et cédant au sommeil,
Tous les jours je me couche avecque le soleil ;
Mais en ma chambre à peine ai-je éteint la lumière,
Qu’il ne m’est plus permis de fermer la paupière.
Des filous effrontés, d’un coup de pistolet,
Ébranlent ma fenêtre et percent mon volet ;
J’entends crier partout: Au meurtre ! On m’assassine !
Ou : Le feu vient de prendre à la maison voisine !
Tremblant et demi-mort, je me lève à ce bruit,
Et souvent sans pourpoint je cours toute la nuit.
Car le feu, dont la flamme en ondes se déploie,
Fait de notre quartier une seconde Troie,
Où maint Grec affamé, maint avide Argien,
Au travers des charbons va piller le Troyen.
Enfin sous mille crocs la maison abîmée
Entraîne aussi le feu qui se perd en fumée.

Je me retire donc, encor pâle d’effroi ;
Mais le jour est venu quand je rentre chez moi.
Je fais pour reposer un effort inutile :
Ce n’est qu’à prix d’argent qu’on dort en cette ville.
Il faudrait, dans l’enclos d’un vaste logement,
Avoir loin de la rue un autre appartement.

Paris est pour un riche un pays de Cocagne :
Sans sortir de la ville, il trouve la campagne ;
Il peut dans son jardin, tout peuplé d’arbres verts,
Recéler le printemps au milieu des hivers ;
Et, foulant le parfum de ses plantes fleuries,
Aller entretenir ses douces rêveries.

Mais moi, grâce au destin, qui n’ai ni feu ni lieu,
Je me loge où je puis et comme il plaît à Dieu. »

Satire VI

(Recueil : Satires)

Texte : Inlibroveritas

Scène de marché à Paris à la fin du XVIIe siècle

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