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La publicité vue par un manuel dans les années 1920

Les Principes Généraux de la Publicité

CHAPITRE PREMIER

NOTIONS PRÉLIMINAIRES

QU’EST-CE QUE LA PUBLICITE ?

Définissons d’abord ce que l’on doit entendre par « Publicité » :

Ce sont les moyens de toute sorte destinés à faille connaître au plus grand nombre d’individus possible les produits du commerce et de l’industrie, afin de développer d’abord, de satisfaire ensuite, tous leurs besoins, en les incitant à une acquisition, à une dépense.

La publicité est donc, avant tout, une affaire d’argent. C’est une affaire d’argent pour celui qui consomme et qui paie; c’est encore — et bien plus —une affaire d’argent pour celui qui publie, qui annonce, puisqu’il ne peut publier, annoncer sans débours.

Le problème, pour celui qui annonce, qui publie, est de dépenser le moins possible pour encaisser le plus.. Ou bien, ce qui serait plus exact, de dépenser utilement le plus possible, pour encaisser, en numéraire, le maximum des recettes que sa dépense peut lui procurer. C’est ici qu’est le noeud de la question. C’est ce noeud que nous voulons nous efforcer de trancher avec précision. Mais on
saisit, par cette explication, combien les lois de la publicité sont d’ordre purement matériel et économique, et combien notre théorie, QUE NOUS APPUYONS UNIQUEMENT SUR LA PRATIQUE, est différente de celles qui tendent à vouloir faire de la publicité une science entièrement abstraite et d’essence purement psychologique. Certes, pour mettre en oeuvre ces lois, il faut de la psychologie. Mais cette psychologie NE VA PAS AU DELÀ DES SENTIMENTS SIMPLES ET NATURELS et elle ne nous entraîne pas jusqu’à exiger de nous la connaissance absolue et scientifique des tréfonds de l’âme humaine.

Avant d’entrer dans le détail de la publicité, quelques consi dérations accessoires nous paraissent devoir prendre leur place ici. –

Disons, notamment, qu’un économiste allemand, le professeur Werner Sombart, qui, d’ailleurs, n’aime pas la publicité, a cherché, dans le journal berlinois der Morgen, n° 10, 1908, et dans la
Zukunft, 27 juin 1908 (l’étude publiée dans cette revue porte le titre caractéristique de lhre Majestàt die Rehlame), à faire un départ entre la publicité et la réclame.

Réclame et publicité.

Le professeur Sombart voudrait que l’on ne considérât comme de la publicité que toutes les choses, toutes les informations ayant un caractère d’utilité générale : la littérature destinée à faire connaître une invention, à répandre le nom d’un homme, d’un savant, d’un explorateur, à signaler les beautés d’un livre, d’une découverte, etc. La publicité, pour lui, serait seulement ce qui s’affiche, ce qui s’imprime, sans que cet affichage, cette impression donnent lieu à une tractation commerciale quel-
conque. C’est, en somme, la publicité gratuite et désintéressée.

Par opposition, il classe sous la dénomination de réclame, dans son sens le plus péjoratif, toute publication, toute impression qui donnent lieu, pour celui au bénéfice, au profit de qui elles sont faites, à un débours d’argent, à des contrats, à des traités commerciaux. La réclame serait, pour lui, la forme mercantile de la publicité.

Pour nous, Français, nous établirons également une différence entre la publicité et la réclame, en ce sens que nous réserverons de préférence le mot de réclame pour désigner la publicité tapageuse ou malhonnête, la publicité prise dans une acception péjorative. En outre, dans un sens plus restreint, le mot de réclame désigne aussi une forme spéciale d’annonce, comme nous le verrons plus tard. I

LA PUBLICITE EST-ELLE UNE SCIENCE ?

EST-ELLE UN ART ?

La publicité=science.

On s’est souvent demandé si la publicité était une science ou était un art. Cette question, quoique d’importance secondaire au point de vue pratique, mérite d’être élucidée.

Il faut- répondre, sans hésiter, une science et un art. C’est une science dans sa conception, par exemple; mais une science purement psychologique, par conséquent, et de nature essentiellement philosophique.

Si nous n’admettons pas que la publicité appartienne au domaine de la psychiatrie, elle n’exclut pas pour cela l’application des lois de la psychologie élémentaire. Puisqu’en effet, nous affirmons qu’elle SUGGÈRE SANS SUGGESTIONNER, il apparaît que celui qui en fait doit savoir comment, par quels moyens, par quels calculs, il parviendra à agir sur le public à qui il s’adresse, de manière à lui suggérer l’envie, puis le besoin de la chose offerte. L’étude des divers mouvements de l’âme et des
formes variées qu’affectent les sentiments se place au premier rang des facteurs à envisager, sans que pour cela, ainsi que nous l’avons dit déjà, cette étude comporte la recherché des solutions compliquées de la psychologie subjective et la connaissance des abstractions impondérables de la conscience.

Les sentiments qui entrent le plus fréquemment en jeu dans l’influence exercée par la publicité sont les suivants :
La curiosité, La vanité, La pusillanimité,

L’intérêt, La confiance, La cupidité.

La propriété La crédulité, (ou possession),

LES SENTIMENTS MOTEURS DE LA PUBLICITÉ

La curiosité.

C’est le sentiment le plus commun et le plus faible qu’on puisse pratiquement exciter par la publicité. On peut même assurer qu’il est le premier qu’on doive s’attacher à faire mouvoir, les autres sentiments lui étant subordonnés. La curiosité n’est pas encore l’intérêt, mais elle y conduit, et c’est en excitant la curiosité d’abord qu’on parviendra à faire éprouver ensuite les divers autres sentiments.

EXEMPLE :

C’EST DEMAIN QUE
s’ouvrira, au132 de lu rue d’Hauteville, la nouvelle brasserie « Belgiea » où l’on trouvera
toujours, à toute heure, de l’excellente choucroute et des saucisses de Strasbourg de provenance directe.

Tous les Belges de passage à Paris ou l’habitant se feront certainement une joie de visiter ce splendide établissement, dont l’aménagement et ta décoration ont été copiés sur ceux des plus
célèbres brasseries de Bruxelles, Belgica » restera ouverte jusqu’à deux heures du matin.

Ici, la curiosité est suscitée simplement par les premiers mots de l’annonce. L’intérêt est réservé
jusqu’au moment où le texte aura appris au lecteur quel événement doit se produire le lendemain.

Mais si ce lecteur n’aime pas la bière belge, s’il déteste la choucroute et les saucisses de Strasbourg, ni l’intérêt, ni aucun des sentiments moteurs ne seront excités.

L’intérêt.

La curiosité éveillée, il ne s’ensuit pas toujours que sa satisfaction aura fait naître l’intérêt. Du resté, l’intérêt n’est pas un sentiment impérieux. Il ne commande pas l’acte, mais il le fait admettre comme possible, comme réalisable, dans certaines circonstances et sous certaines conditions. L’intérêt, qui suit la curiosité, précède, comme elle, tous les autres sentiments que la publicité provoque. Si, après avoir éveillé la curiosité, il n’en résultait pas de l’intérêt pour la chose annoncée, c’est que la publicité n’aurait pas été pourvue de l’énergie suffisante à son action. Elle n’opérerait pas alors, et ne provoquerait pas à l’acte, acte d’achat généralement.

La publicité théâtrale offre de nombreux exemples de publicité simplement créatrice d’intérêt.

EXEMPLE :

— Après quelques retards, nécessités par la mise en scène très compliquée, la Direction du Théâtre
des Nouveautés annonce pour lundi irrévocablement la répétition générale de la pièce nouvelle de M. Edgard Turlupin, l’auteur si souvent applaudi de : II n’y a plus d’enants. Le titre de l’oeuvre nouvelle du délicat écrivain est : Cherchez la femme. Polaire a trouvé, dans le rôle de Mme Bouleslin, une des créations les plus remarquables de sa carrière et on nous fait prévoir, outre des débuts sensationnels, une véritable révélation, avec Paulus, qui interprétera le rôle du général Moreau-Cbandonncur. Le bureau de location est ouvert dès à présent pour les représentations du mardi 23 et les suivantes.

Le lecteur a été intéressé par l’annonce de ce spectacle nouveau; mais il se réserve le plus souvent
et se dit qu’il ira voir cette pièce si : les journaux en font un compte rendu élogieux, si sa femme consent a 1 y accompagner, si le temps est favorable, si, le jour où il pourra se rendre au théâtre, ses
mo3rens lui permettent de prendre deux fauteuils, si son ami le journaliste lui procure des billets de faveur, etc.

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photo credit: Omar Omar

Source

Titre : Traité pratique de publicité commerciale et industrielle. Le mécanisme de la publicité avec diverses applications / D. C. A. Hémet,… ; avec une préface de Emile Gautier

Auteur : Hemet, D.C.A (1866-1916)

Éditeur : “la Publicité” (Paris)

Date d’édition : 1922

Contributeur : Gautier, Émile (1852-1937). Préfacier

Contributeur : Angé, Louis. Éditeur scientifique

Type : monographie imprimée

Langue : Français

Format : 2 t. en 1 vol. (XXIX-250, 298 p.) : ill. ; in-8

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