textes et sources

Faire savoir : crieur public et afficheur sous la Révolution

“L’audace du crieur public était vraiment extraordinaire. En 1792, il osait annoncer et vendre, à la porte de la convention, des brochures qui portaient ces titres : Vous f..tez-vous de nous? — Rendez-nous nos dix-huit francs, f..tez-nous le camp, la guillotine vous attend.—Donnez-nous du pain ou égorgez-nous ! — Grand décret sur les allumettes et l’amadou !

Manuel dénonça le fait à la convention, mais en pure perte. La foule eût pris la défense des crieurs et chanteurs publics. Autour des uns et des autres il y avait cercle et affluence de monde.

Criait-on la découverte d’un complot, — le peuple répondait par des menaces contre les brigands, contre les infâmes conspirateurs. Criait-on une nouvelle réquisition, — beaucoup de gens allaient s’enrôler. Criait-on la victoire de Fleurus? —les hommes, les femmes, les vieillards , les enfants battaient des mains, suivaient le bon nouvelliste en tirant des pétards ; et, le soir, les façades des maisons étaient illuminées.

Souvent, un passant payait à boire au crieur, dont le gosier desséché au service de la patrie méritait bien cette récompense. Ici, un vieux militaire l’interrogeait; là, c’était une femme, une mère inquiète, qui lui demandaient si le nombre des morts avait été considérable à telle bataille ; plus loin, deux enfants, politiques précoces, hasardaient des demandes et des observations. Le crieur public, comme on le pense bien, ne manquait pas de trancher du personnage important, lui qui savait déjà ce que les autres ignoraient encore. Prenant tantôt des airs de bienveillance et de bonté, tantôt des airs de mécontentement et de supériorité, il ré pondait à tous en manière d’oracle. S’il ne savait pas lire, il s’abstenait de répondre. Son imprimeur lui avait appris nécessairement la phrase sacramentelle : Voici les détails de la fameuse victoire, etc. Il la répétait à satiété. Les détails, il fallait un sou pour les posséder. Le crieur habitait un garni; le crieur mangeait à la gargote; le crieur était zélé clubiste, sans-culotte ardent; le crieur était « homme d’action. » Il avait le certificat de civisme, aussi bien que le chanteur des rues.

Une variété du crieur, c’est l’afficheur : leurs mœurs étaient semblables à tous deux, et leur ministère différait de bien peu. Toutefois, le rôle de celui-ci s’effaçait davantage. Si la foule le suivait et s’intéressait à ses travaux, toujours est-il qu’elle n’avait pas avec lui de rapports directs. Il paraissait à l’angle d’une rue populeuse, il se plaçait devant un mur, collait son affiche devant un groupe de curieux, puis s’évanouissait, laissant de la pâture à la foule. On lui parlait rarement, car il n’avait pas, comme le crieur public ou le chanteur des rues, le don de l’éloquence. Il se renfermait, d’ailleurs, par goût et par système, dans un mutisme fort mystérieux. Quelqu’un l’interrogeai t-il, l’afficheur semblait répondre, au moyen d’un simple hochement de tête : Vous allez lire vous-même! vous allez savoir de quelle importance sont les choses que j’affiche ! — Il est vrai qu’il collait périodiquement sur les murs les plus fameux décrets, et les numéros du terrible Bulletin du tribunal révolutionnaire.

Ainsi, le chanteur des rues, le crieur public et l’afficheur forment une même famille. Ce sont les hommes-annonces, par l’intermédiaire desquels les classes infimes, peuvent apprendre les nouvelles, et se mettre au courant de la politique.

Tous trois existent encore de nos jours ; mais le chanteur n’a plus de mission politique, et l’afficheur reste inconnu à la foule, à cause de la progression infinie des hommes de son métier.

Le crieur public seul a encore le beau privilège de prononcer les mots de conspiration, attentat ou assassinat, de voir se former un cercle autour de lui, et de vendre, le jour de l’ouverture des chambres, le journal du soir le Moniteur parisien, au prix fabuleux de quinze sous le numéro.”

A. C.

Source : Augustin Challamel, Wilhelm Ténint, Henri-Charles-Antoine Baron, L. Massard, John Boyd Thacher Collection (Library of Congress), 1843

Bat-fuck insane
photo credit: Sebastian Fritzon

Métiers du négoce : l’Epicier

Les métiers de la marchandise : l’épicier du Moyen-Age au XVIIIeme siècle

Village de Castelnaud vu d'en bas
photo credit: Marc Lacoste

“L’épicier proprement dit fut primitivement chez nous le marchand de gros, l’épicier grossier (les Anglais désignent encore leur épicerie sous le nom de grocery). Il recevait de première main les drogues et les épices, et les vendait soit au détaillant, soit directement au consommateur. Le détaillant n’appartenait pas au corps de l’épicerie son nom officiel était regrattier il débitait, non seulement de l’épicerie, mais du pain, du sel, du fromage, des œufs, du poisson de mer, de la volaille, du gibier. Il pouvait être établi en boutique, mais le plus souvent il était marchand ambulant et, depuis le matin jusqu’au couvre-feu, il allait par les rues joignant sa mélopée aux autres crieries de Paris. L’acheteur qui se respectait faisait ses emplettes chez l’épicier. Mais à petite bourse petit marchand le menu peuple accordait ses préférences à l’éventaire du regrattier; il le trouvait à sa portée et répondait à l’appel.

Le regrattier ne put forcer les cadres de l’épicerie aussi longtemps que les monopoles subsistèrent; mais, après la Révolution, le premier venu, pourvu qu’il payât patente, eut les mêmes droits que les anciens maîtres, put prendre le même titre qu’eux, et les intrus, les parvenus de l’épicerie, se multipliant dans toute la ville, en relations de chaque jour avec leurs voisins, sans cesse sous leurs yeux, il devinrent pour ainsi dire le type consacré de l’épicier aussi s ont-ils fait déchoir l’épicerie dans l’opinion

Notre siècle (le XIXe siècle) partage encore trop les préjugés aristocratiques de Cicéron, pour qui le commerce de détail était chose sordide, tandis que le commerce d’importation en grand pouvait s’avouer, à la rigueur. Mais, tout en repoussant cette hiérarchie, tout en refusant de parquer le petit commerce dans une caste infime, il faut ici voir l’épicerie sous ses r différentes formes, et tenir à la fois compte du gros et du petit négoce. L’épicier grossier, pour qui sans doute le commerce du gros n’excluait pas le détail, est le prédécesseur direct des marchands qui continuent encore le même commerce dans le quartier adopté par l’épicerie dès le moyen âge. Fixée définitivement dans la rue des Lombards et aux environs, elle y a assez fidèlement gardé sa physionomie première. Le magasin n’a pas fait de concession au luxe la nécessité ne s’en imposait pas les caisses, les fûts, les ballots ne laissent d’ailleurs aucun mur libre pour le décorateur. Sans doute, le local a dû être élargi pour répondre à l’importance des affaires et à la multiplicité croissante des opérations l’étroite façade du moyen âge avec sa fenêtre unique, dont le bord recevait l’étalage et l’auvent sous lequel le marchand traitait avec l’acheteur, a dû disparaître mais la maison a gardé ses titres de noblesse commerciale représentés par des enseignes séculaires. Le Centaure, la Barbe d’Or, le Bras d’Or, le Soleil d’Or, l’Image de Notre-Dame rappellent l’époque ou. les maisons ne portaient pas encore de numéros le Mortier d’Or date au moins du xve siècle. Villon, dans son Petit Testament, M réserve un legs. Dans ces parages, se sont de tout temps réalisées de grosses fortunes. En 1470, Louis XI ne trouve rien de mieux pour son hôte, Alphonse V, roi de Portugal, que de l’installer dans le logis de l’épicier Laurent Herbelot, rue des Prouvaires.

HENRY'S GROCERYL’épicier fut, jusqu’au XVe siècle, épicier-apothicaire, et put cumuler sans réclamations ni inconvénients tant que la pharmacopée, tout empirique, se réduisit à une sorte de routine, l’apprentissage tenait lieu d’études théoriques. Certains apprêts, certaines boissons mentionnées dans les menus gothiques relèvent-ils de la médecine ou de l’art culinaire? Il est telle recette formulée par le codex dont on ne saurait dire si elle est à l’intention du malade ou du gourmet. Platon récrimine contre trois arts, selon lui pernicieux et criminels au premier chef, et chacun, par malheur, est le faux frère d’un art bienfaisant et honnête. La sophistique corruptrice a un air de famille avec la saine philosophie; la parfumerie, à l’aide de ses artifices, fait concurrence à la beauté mâle, saine, sincère, fille de la gymnastique; la cuisine, avec ses raffinements meurtriers, est aussi malfaisante pour le corps que la médecine lui est secourable. Mais le moyen âge s’écoula avant qu’on établit un cordon sanitaire entre la gastronomie et la thérapeutique. Le laboratoire fut aussi cuisine la même main puisa à peu près dans les mêmes tiroirs et les mêmes bocaux poison et contrepoison. Voici les liqueurs présentées au moment des épices avec ses dragées et ses confitures, le praticien apportait son vin herbe, parfumé aux infusions de plantes. S y y avait ajouté les aromates d’Asie, la liqueur était dite piment, ou nectar les piments les plus renommés, le clairet et l’hypocras, en vogue même au XIIIe siècle, étaient parfumés à grand renfort d’épices. Comme les convives de jadis, tout gros mangeurs qu’ils fussent, faiblissaient à la fin des repas démesurés, il leur fallait attiser le feu nécessaire à la « concoction », en prenant certaines mixtures où entraient, par exemple, la sauge, le gingembre, la cardamone, la cannelle, le safran pulvérisés. D’autres conseillaient aux estomacs délabrés le fenouil combiné avec jus de citron, coriandre, conserve de roses, mastic, cannelle. Plus tard, 1’eau-de-vie, d’abord vénérée comme une panacée universelle, passera de la fiole aux potions dans le flacon du gourmet; mais ce sera toujours sous le couvert de l’apothicaire.

Dès le XVe siècle, la chimie médicale avait fait assez de progrès pour que le divorce de la pharmacie et de l’épicerie s’imposât s’il ne fut définitivement prononcé qu’en 1777, lorsque le Collège de pharmacie s’ouvrit rue de l’Arbalète, il avait déjà été précédé d’une séparation légale. La difficulté était de régler les droits de chaque partie; mais, à partir du règne de Charles VIII, épiciers-droguistes et apothicaires sont bien distincts. La tendance de plus en plus prononcée est de réduire l’épicerie au commerce des matières premières ou drogues simples, sans le droit de procéder aux pesées médicales, au dosage ou à la confection des médicaments. A partir de 1777, les pharmaciens forment enfin un corps absolument séparé. Leur monopole s survécut à l’ancien régime, et il fut le seul; le nouveau code lui donna une nouvelle consécration.

Mais les épiciers, battus en brèche du côté de la pharmacie, n’avaient pas attendu la Révolution pour s’indemniser d’un autre côté ils transformèrent peu à peu leur négoce en spéculant, dès le XVIIe siècle, sur la commodité que trouve l’acheteur à faire ses emplettes dans un même magasin. Dès 1620, ils vendirent du fer ouvré et non ouvré, du charbon de terre, même. Cependant, pour chacun de leurs empiétements, ils durent se soumettre à des conditions protectrices des droits et des intérêts respectifs en 1731, ils sont autorisés à vendre ratafias, eaux de senteur, fruits à l’eau-de-vie mais ils les livrent par bouteilles pour ne pas faire tort aux limonadiers de même, ils doivent fournir le café non brûlé, le thé en feuilles et non en infusion, mais ils conquièrent le droit de faire boire de l’eau-de-vie et des liqueurs même à leur comptoir. En 1740,ils tiennent les légumes secs en gros et en détail, mais avec obligation d’en porter un tiers aux halles et interdiction de les tirer d’un rayon moindre de vingt lieues autour de Paris. Avec des restrictions analogues, ils continuèrent d’annexer les commerces les plus divers; tandis que les jambons et autres viandes de porc en provenance de Bordeaux, Bayonne, Mayence ou ailleurs ne devront pas sortir de leurs magasins autrement que par tonnes, le papier, au contraire, ne s’y écoulera qu’au cahier ou à la main, et non à la rame. La provision de vinaigre ne dépassera pas trente pintes et sera débitée pinte par pinte. Pour être libres de vendre les couleurs broyées et non plus brutes, plusieurs épiciers se firent recevoir peintres. La Révolution les affranchit de toutes ces gênes ils ne furent plus tenus de respecter que les droits du pharmacien et ceux de l’herboriste. Les règlements du 21 germinal an XI assurèrent définitivement au seul pharmacien la vente des médicaments préparés et des substances vénéneuses, au seul herboriste celle des herbes et substances médicinales inoffensives, et l’épicier n’obtint de tolérance que pour les farines de graine de lin et de moutarde, la gomme et les sirops où elle entre, ces substances étant à double fin et pouvant être réclamées pour l’usage domestique.

Grocery variations

photo credit: Jsome1Corporations des épiciers-apothicaires. Les épiciers-apothicaires, parmi lesquels étaient compris également les droguistes, les confiseurs-confituriers, les ciriers-ciergiers, formaient la seconde des six grandes corporations marchandes, sorte d’aristocratie industrielle reconnue par la municipalité Depuis 1484, ils avaient la garde des poids et mesures ils conservaient dans la maison de la rue des Lombards dite le Poids du Roi l’étalon royal qui, tous les six ans, se vérifiait à la Monnaie sur les matrices originales. Celles-ci étaient gardées sous quatre clefs; elles étaient en cuivre très fin, d’un travail estimé, et l’on aimait à croire qu’elles dataient de Charlemagne. Le bureau de l’épicerie était au cloître Sainte-Opportune. Voici, d’après l’armorial de 1696, la description des armes qu’elle avait été autorisée à prendre « D’azur à un dextrochère (main droite) d’argent mouvant d’une nuée de même, et tenant des balances d’or, àdeux navires de gueules équipés d’azur semé de fleurs de lis d’or, posés l’un contre l’autre, flottant sur une mer de sinople et accompagnés de deux étoiles à cinq rais de gueules. » La devise Lances et posera servant (ils gardent les balances et les poids) surmontait l’écu. Le nombre des navires indiquait le rang parmi les métiers ainsi, les drapiers, le premier des cinq corps, n’en avaient qu’un. La communauté était régie par six jurés, moitié épiciers, moitié apothicaires, chargés de veiller à l’observation des statuts. Pour être admis à la maîtrise. il fallait avoir été trois ans apprenti, trois ans serviteur ou garçon; la corporation était une garantie d’aptitude, de probité, une association d’assistance mutuelle, une protection pour l’apprenti et le garçon qui devaient être paternellement surveillés, paternellement traités. Par malheur pour les épiciers, à dater du jour où l’apothicairerie trouva mal assortie l’union des deux métiers en un seul corps, ils cessèrent d’y être traités sur un pied d’égalité, et, à chaque conflit, subirent un échec dans les réunions communes, la prépondérance fut assurée à leurs rivaux ceux-ci refusaient la participation du juré épicier à l’examen du chef-d’œuvre que leurs candidats à la maîtrise élaboraient sous les yeux des experts; pareille épreuve n’existant pas pour les épiciers, on les trouvait disqualifiés pour siéger dans une commission d’examen. D’autre part, les gardes apothicaires furent investis du droit de visiter la droguerie chez leurs adversaires et ils exercèrent ce droit avec rigueur, n’hésitant pas à prononcer, contre toute infraction aux règlements, l’amende et la suspension de six mois Sous l’ancien régime, l’association commerciale se doublait presque toujours d’une association religieuse dite confrérie. La confrérie des épiciers-apothicaires avait son siège aux Augustins, où se tenait en outre l’assemblée générale de la corporation. Elle s’était donné pour patron un saint qui avait obtenu ses grandes lettres de naturalisation parisienne depuis qu’un aventurier normand avait, par un rapt, enlevé ses reliques à une église d’Orient, saint Nicolas. L’épicerie, dont les plus précieuses denrées étaient de provenance orientale, comme les restes vénérés, ne pouvait mieux faire que de se placer sous la sauvegarde de saint Nicolas, déjà protecteur de la batellerie. L’orthodoxie du corps exigeait de tous ses affiliés, outre la qualité de Français ou naturalisé tel, une profession de foi catholique. Parmi eux, le calvinisme ne dut pas recruter de nombreux prosélytes un riche marchand de la rue Saint-Denis, Gastine, tint bien dans son logis une assemblée de huguenots, mais rien ne prouve qu’il fût épicier, et le quartier vit avec transports brûler l’hérétique et raser sa maison. Avec la majorité de la bourgeoisie, les épiciers épousent la cause de la Ligue mais ils ne tardent pas à se refroidir, et il en est plus d’un et qui prononce un « date pacem » en soupirant (Satire Ménippée)..

Après la bataille d’Ivry, le duc de Nemours organisa 1défense de Paris et assigna à chaque détachement de la milice la partie du rempart qu’elle aurait à défendre. L’apothicaire Du Fresnoy était colonel des forces qui eurent à garder le rempart Saint-Honoré. Les épiciers, en effet, n’attendirent ni 1830 ni 1789 pour parader sous le costume militaire dans les cadres d’une milice urbaine. Sans remonter jusqu’à Bouvines où Philippe-Auguste opposa des contingents communaux à la formidable agression tudesque, sans parler non plus du guet des bourgeois institué par Louis IX, nous voyons Louis XI armer contre la ligue du Bien public artisans bourgeois de Paris, et leur confier la « garde, tuicion et defense de sa bonne ville et habitants d’icelle». Les hommes de seize à soixante ans eurent à se procurer un habillement « souffisant selon leur possibilité, une longue lance couleuvrine à main, une brigandine, une salade ». Maîtrise et artisans furent répartis en soixante et une compagnies distinguées par des bannières armoriées de leurs insigne: les épiciers-apothicaires formaient la 48e bannière chacun fut autorisé à sortir costumé et armé, les dimanches et jours de fêtes les six métiers avaient leur rang aux entrées solennelles où ils représentaient le commerce parisien. Le décret du 23 juin 1790 abolit les armoiries celui du 17 mars 1791 supprima les corporations. Ce fut sans doute au grand regret des privilégiés mais de pires soucis leur étaient réservés; les boutiques d’épiciers furent particulièrement menacées lorsque la disette des denrées déchaîna l’émeute, et plusieurs furent mises à sac ; les pillards éventraient ballots et barils, et vendaient à vingt sous le sucre qui en valait plus de trente. Le blocus continental le fit monter bien davantage, mais du mal sortit un bien la betterave, entrant en concurrence avec la canne, devait permettre un jour à l’épicerie de vulgariser un produit longtemps interdit au pauvre. La transformation de la s chicorée en café fut un bienfait plus discutable, à cause même du parti qu’en surent tirer les vendeurs indélicats.”

Source : grande Encyclopédie

SuperTarget Durham, NC
photo credit: j.reed

Publicité pour une curieuse assurance durant le siège de Paris (1870-1871) !

Une publicité pour une assurance lors du siège de Paris (1870-1871)

Association Mutuelle

DES

RISQUES DU SIEGE DE PARIS

AUTORISÉE PAR DÉCRET

DU GOUVERNEMENT DE LA DÉFENSE NATIONALE

En date du 15 Septembre 1870.

Une publicité curieuse pendant le siège de Paris (1870-1871)


Paris, le 7 Octobre 4870.

MONSIEUR,

Je crois de votre intérêt d’appeler votre attention sur les services que peut rendre l’Association Mutuelle des Risques du Siége de Paris, fondée en vertu d’un décret en date du 15 Septembre 1870.

Les Compagnies d’assurances contre l’incendie ne remboursant pas les sinistres causés par les faits de guerre, c’est pour combler cette lacune que l’Association a été fondée.

Dans la première zone comprise, en dedans des boulevards intérieurs, on paie comptant cinquante centimes pour une assurance de mille francs.

Dans la deuxième zone (entre les boulevards intérieurs et les anciens boulevards extérieurs), on paie comptant un franc pour une assurance de mille francs.

Dans la troisième zone (territoire annexé), on paie comptant un franc cinquante centimes pour une assurance de mille francs.

Même en cas de graves sinistres, la cotisation ne peut jamais excéder 1 pour cent dans la première zone, 2 pour cent dans la deuxième zone, et 3 pour cent dans la troisième zone.

Au cas où il n’y aurait pas de bombardement, l’Administration étant absolument gratuite, il n’y aurait à prélever que les frais déboursés, et la presque totalité du versement serait restituée.

L’Association garantit à ce jour (7 Octobre), 250 millions de valeurs divisées en 3,000 risques répartis presque également dans chacune des trois zones.

Les fonds versés sont déposés à la Banque de France, au Crédit Foncier et au Comptoir d’Escompte.

Veuillez agréer, Monsieur, l’assurance de mes sentiments distingués,

LE DIRECTEUR,

Amédée THOURET.

Un prospectus à Lyon en novembre 1871

PROSPECTUS DE LA SOCIETES PRODUCTION ET DE CONSOMMATION AYANT POUR TITRE

Le Comptoir terrestre de l’Homme et de la Femme

comptoir-terrestre

Depuis bien des années l’auteur a conçu et mûri les idées qu’il émet aujourd’hui. Équilibrer, en les faisant sympathiser, le Travail et le Capital, ces deux agents de production ; c’est-a-dire faire à chacun d’eux des conditions et des avantages équitables, tel est le but auquel il a visé.

Dans une première brochure, intitulée L’IMPOT UNIQUE *, M. GACHE neveu a expliqué son système de contre-monnaie, système qu’il avait proposé à l’administration municipale de Lyon, dès le mois de septembre 1870, comme pouvant parer aux difficultés de la situation en présence de nos désastres. Il offrait de plus son concours comme organisateur du plan qu’il soumettait.

* Cette brochure, dont le prix est de 80 centimes, est en vente chez tous les Libraires.

L’Impôt unique, par l’emploi d’une contre-monnaie vendue par l’État et dont le cours serait rendu obligatoire pour toutes les transactions, se rattache à la création de la Société appelée Comptoir terrestre de l’homme et de lafemme.

Cette Association servirait d’intermédiaire entre la production et la consommation, sous quelque forme que ce puisse être. Les quatre éléments qui la composent sont : l’Agriculture, le Commerce, les Arts et les Sciences. Elle a pour base la trilogie républicaine : LIBERTÉ,ÉGALITÉ,FRATERNITÉ. Sa devise sera : Fais ce que tu voudrais que l’on fit pour toi, et ne fais pas à autrui ce que tu ne voudrais pas qui te fût fait.

Cette Association, prenant l’Homme et la Femme a leur naissance, les accompagne jusqu’au tombeau. Elle pourra fonctionner sur une grande comme sur une petite échelle, et chacun de ceux qui en feront partie y trouvera ses intérêts sauvegardés.. Le travail, quel qu’il soit, manuel ou intellectuel, recevra sa rémunération; le capital aura toute garantie pour ses rentes.

Sans que rien soit changé aux positions acquises, l’homme et la femme, dans toutes conditions sociales, seront assurés de trouver en tous pays, a la charge de se conformer aux lois, tout ce qui est nécessaire à la satisfaction des besoins imposés par la nature. Le Comptoir terrestre ne changera rien aux errements habituels de la vie ; il consolidera ce qui existe, en même temps qu’il créera ce qui n’existe pas. Chacun participera au bien-être matériel, dans une proportion équitable et suivant ses droits. Les enfants des deux sexes, depuis leur naissance jusqu’à leur quinzième année, toucheront une rente de 1 franc par jour, destinée à les élever et a subvenir à leur éducation.

En un mot, l’Association réalisera cette maxime : Chacun pour tous, tous pour chacun.

Les fonctionnaires et employés de l’Association, dans les diverses catégories qu’elle embrassera, seront élus par le suffrage universel. Point de sinécures, mais pas de fonctions gratuites, tout emploi sera salarié, car le temps est un capital que chacun peut utiliser plus ou moins fructueusement, selon ses forces physiques ou ses aptitudes, intellectuelles. La nomination de tous les fonctionnaires étant soumise au suffrage universel, l’auteur du projet ne disposera d’aucun emploi, il ne pourra faire partie lui-même de l’Administration de la Société, qu’en vertu du mandat qui lui aura été déféré.

C’est par ce motif que pour propager ses idées, soit par la voie de la presse, soit par toutes autres démarches qui pourront l’amener a réaliser ses vues, il a recours a une souscription volontaire, laissant d’ailleurs à chacun toute latitude quant au chiffre de la souscription. Les personnes qui voudront que leurs noms soient connus n’auront qu’à en témoigner le désir, il en sera de même pour celles qui voudraient conserver l’anonyme. Il convient pourtant de faire remarquer que les souscriptions prouvant des sympathies en faveur de l’Association, il serait à désirer que les adhérents se fissent connaître, car ce serait pour d’autres un encouragement.

Une somme de 20,000 fr. suffirait a M. Gâche pour établir et organiser l’Association qu’il propose, de manière à la faire fonctionner, sur de petites dimensions il est vrai, mais on va du petit au grand, et à mesure que l’on pourra apprécier ses résultats, elle grandira et prospérera de plus en plus.

Un journal hebdomadaire ou publié deux fois par semaine, sera l’organe de publicité destiné a traiter les questions de détails. Ce journal, intitulé le Régénérateur, fera suite au Sauveur de la France dans l’actualité et pour l’avenir, publication qui a eu plusieurs numéros, et a développé les idées de M. Gâche, ainsi que les résultats qu’elles peuvent amener.

En outre, une brochure ayant pour titre : Comptoir terrestre de l’homme et de la fouine paraîtra très-prochainement. Les personnes qui souscriront auront droit a cette brochure, laquelle fera suite a celle de l’Impôt unique que l’on peut consulter pour tous les détails que nous ne pouvons aborder ici.

La publication du journal et celle de la brochure auront lieu aussitôt que le permettra le montant recueilli des souscriptions volontaires,

Le produit de la souscription, celui de la vente des brochures, livrets, dessins, journaux et matériel pour la contre-monnaie, sont destinés à couvrir les frais que M. Gâche a eu et aura encore a faire pour propager ses idées et atteindre, son but, et a rémunérer son travail matériel.

En dehors de ces sommes, toutes celles qui seront versées pour l’Association une fois constituée, seront déposées dans des banques instituées ad hoc.

L’auteur du projet ose espérer que, poursuivant un résultat qui sera avantageux a tous, il trouvera partout des sympathies qui lui permettront de mener à bonne fin une oeuvre d’intérêt général.

JEAN GACHE, neveu.

PASSAGE DE L’ENFANCE, A LA CROIX-POUSSE

LYON (RHÔNE).

Lyon. 3 novembre 1871.

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Source : Titre : Prospectus de la société de production et de consommation,… le Comptoir terrestre de l’homme et de la femme. [Signé : Jean Gache, neveu.]

Auteur : Gache, Jean

Éditeur : impr. de Labasset (Lyon)

Date d’édition : 1871

Langue : monographie imprimée

Langue : Français

Format : In-4° , 3 p.

Source : Bibliothèque nationale de France

Saône
photo credit: romainguy

Colportage et colporteur au XIXeme siècle

Présentation juridique et fiscale du métier de colporteur effectuant colportage au XIXeme siecle

Hawker at Giza pyramid panorama
photo credit: Daveness_98

[[ Métier exercé par de petits marchands ambulants qui vont de ville en ville, de village en village vendre de menus objets. En principe, depuis la loi du 2 mars 1791, le colportage est absolument libre, et ceux qui l’exercent sont considérés et traités comme des commerçants, avec tous les droits et obligations qui résultent de cette qualité : notamment ils sont passibles de l’art. 479, n° 5, du Code. pénal, au cas où ils feraient usage de faux poids ou de fausses mesures, bien que cet article ne vise expressément que les marchands en boutique ou en magasin ; ils peuvent être déclarés en faillite ou condamnés comme banqueroutiers; ils ont, pour tout ce qui concerne leur commerce, leur domicile là où ils ont transporté leurs marchandises et où ils exercent, même momentanément, leur métier; enfin c’est le tribunal de commerce de ce lieu qui est compétent pour connaître des actions dirigées contre eux pour faits de leur négoce et pour déclarer leur faillite; ils peuvent également être actionnés devant le tribunal de commerce de leur domicile, si, indépendamment de leurs résidences momentanées, ils ont un domicile fixe. Les colporteurs sont assujettis à la patente (loi du 25 avril 1844) qui est plus ou moins forte selon qu’ils voyagent en portant eux-mêmes leur balle, ou avec des bêtes de somme, ou avec des voitures. Et, s’ils font en même temps un commerce sédentaire, le plus élevé des deux droits est seul dû, conformément aux principes généraux du droit fiscal. Ils sont imposés dans la commune où ils ont leur domicile, et, au cas où ils n’ont pas de domicile fixe, dans la commune où ils résident le plus habituellement.
photo credit: My BuffCastañas en el fuego (PS)o

Le colportage est spécialement sous la surveillance de la police, à raison de l’existence plus ou moins vagabonde de ceux qui l’exercent et de la facilité avec laquelle ils peuvent écouler des marchandises de provenance suspecte, provenant de vols, par exemple. L’administration doit également protéger les marchands sédentaires exposés à une concurrence redoutable des ambulants qui n’ont pas tant de frais et vont solliciter la clientèle à domicile. La police a déplus le droit d’interdire le colportage Reflets et hardes ayant appartenu à des personnes atteintes de maladies contagieuses; elle peut défendre aux colporteurs de stationner aux endroits où leur affluence gênerait la circulation, ou devant les magasins et boutiques de marchands sédentaires qui vendent des objets semblables.

Par exception le colportage de certaines matières est soumis à des obligations spéciales, ou même prohibé Les marchands ambulants ou colporteurs de matières d’or ou d’argent doivent, comme tous les marchands sédentaires, tenir un registre, n’avoir que des marchandises portant le poinçon de l’état, n’acheter que de personnes connues ; ils doivent de plus « à leur arrivée dans une commune, se présenter à l’administration municipale, ou à l’agent de cette administration dans les lieux où elle ne réside pas et lui montrer le bordereau des orfèvres qui leur ont vendu les objets d’or et d’argent dont ils sont porteurs » (loi du 49 brumaire an VI, art. 92). Faute par eux d’obéir à cette prescription, les objets sont saisis. L’art. 94 de la même loi, § 2, est ainsi conçu : « Le tribunal de police correctionnelle appliquera aux délits des marchands ambulants les mêmes peines portées dans la présente loi contre les orfèvres, pour des contraventions semblables. » Comme les orfèvres ne sont jamais tenus de représenter les bordereaux des marchandises qu’ils détiennent, la jurisprudence en a conclu qu’aucune peine, sauf la confiscation dont il a été ci-dessus parlé, ne saurait être prononcée contre les colporteurs de marchandises d’or ou d’argent qui voyagent sans bordereaux.

2° Le transport de cartes à jouer par un colporteur non autorisé par la régie constitue à lui seul le délit prévu et puni par l’art. 466 de la loi du 28 avril 4846 ainsi conçu : « Tout individu qui fabriquera des cartes à jouer, ou qui en introduira dans le royaume ou qui en distribuera, vendra ou colportera, sans y être autorisé par la régie, sera puni de la confiscation des objets de fraude, d’une amende de 4,000 à 3,000 fr. et d’un mois d’emprisonnement; en cas de récidive, l’amende sera toujours de 3,000 fr. »

3o Le colportage de tabacs non munis de la vignette de l’Etat est également, à lui seul, un délit puni par l’art. 222 de la loi précitée du 28 avril 1846 : « Ceux qui seront trouvés vendant en fraude du tabac à leur domicile, ou ceux qui en colporteront, qu’ils soient ou non surpris à le vendre, seront arrêtés, constitués prisonniers et condamnés à une amende de 300 à 4,000 fr., indépendamment de la confiscation des tabacs saisis, de celle des ustensiles servant à la vente, et, en cas de colportage, de celle des moyens de transport, conformément à l’art 246. » Les colporteurs de tabacs de fraude peuvent être arrêtés par les agents de contributions indirectes, des douanes, des octrois, les gendarmes, les préposés forestiers et, généralement, par tout agent assermenté (loi du 28 avril 1846, art. 224).

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D’après l’art. 3 de la loi du 4 févr. 1875, « les dispositions relatives à la fraude en matière de tabacs, contenus dans les art. 222 et 223 de la loi du 28 avril 1816, seront appliqués à l’avenir aux contraventions aux lois et règlements concernant le monopole des allumettes. » En d’autres termes, le colportage des allumettes de contrebande est puni comme le colportage des tabacs. Il en est de même, d’après l’art. 25 de la loi du 25 juin 1841, du colportage sans permission des poudres à feu (V. aussi la loi du 24 mai 1834, art. 3).

Enfin, à la suite d’abus qui avaient facilité de nombreuses escroqueries, une loi du 11 juil. 1885 interdit « le colpor­tage et la distribution de tous imprimés ou formules quelconques qui, par leur forme extérieure présenteraient avec les billets de banque, les titres de rente, vignettes et timbres du service des postes et télégraphes ou des régies de l’Etat, actions, obligations, parts d’intérêt, coupons de dividendes ou intérêts y afférents, et généralement avec les valeurs fiduciaires émises par l’Etat, les départements, les communes ou établissements publics, ainsi que par des sociétés, compagnies ou entreprises privées, une ressemblance de nature à faciliter l’acceptation desdits imprimes ou formules, au lieu et place des valeurs imitées. » Les infractions à cette loi sont punies de la confiscation des objets prohibés, d’un emprisonnement de cinq jours à six mois et d’une amende de 16 à 2,000 fr.

Fiscalité. – Colportage de boissons. Par exception à la règle d’après laquelle la destination des boissons doit être déclarée avant leur enlèvement, la régie a créé, pour faciliter l’approvisionnement des pays de montagne, où la vigne n’est pas cultivée des congés spéciaux destinés aux marchands en gros ambulants qui parcourent ces contrées, pour le colportage des vins et des cidres ; mais les considérations qui ont fait prendre cette mesure ne sont nullement applicables à l’eau-de-vie, cette boisson étant soumise à un autre système d’impôt : le congé de colportage a été interdit pour les spiritueux et pour l’hydromel, par une circulaire du 12 déc. 1826.

Pour obtenir des congés de colportage, les déclarants doivent : 1° représenter une licence de marchand ambulant; 2° s’obliger à faire prendre successivement aux différentes recettes buralistes des localités où ils effectueront leurs ventes, de nouveaux congés ou des acquits-à-caution, suivant le cas, portant pour destination le domicile de chacun des acheteurs, et à rapporter, dans un délai déterminé, les bulletins d’expéditions ou les quittances justificatives du paiement des droits acquittés à cette époque ; 3» s’engager, sous bonne et solvable caution, à payer, à défaut de ces justifications, le droit de détail sur la valeur des boissons déclarées, ou bien en consigner le montant. Ils sont tenus en outre d’indiquer les lieux qu’ils entendent parcourir, la quantité, l’espèce et la qualité des boissons qu’ils doivent enlever, le nombre et l’espèce des vases qui les contiennent, le nombre de chevaux, ânes, mulets, etc., qu’ils emploieront au transport, le délai dans lequel ce transport devra être effectué et le prix du litre évalué d’après celui de la vente. Les déclarations devront toujours être faites par les marchands eux-mêmes, et être signées par eux et leur caution. Les buralistes ne doivent pas délivrer de duplicata des congés quelque motif qu’on allègue pour en obtenir. Tout duplicata qui accompagnerait un chargement doit être regarde comme nul. Il est également interdit aux buralistes de délivrer des congés de colportage pour des enlèvements effectués hors delà circonscription de leur bureau (cire, précitée du 12 déc. 1826).

Les colporteurs de boissons ne doivent qu’une licence lorsqu’à leur commerce ambulant ils ne réunissent pas un établissement fixe; autrement ils en doivent deux. Ils peuvent donc, en même temps, être débitants à domicile ou marchands en gros. Dans le cas où ils exercent cette première profession, on ne doit pas s’opposer à ce qu’ils remisent leur chargement dans leur débit ou chez tout autre assujetti de l’espèce ; mais comme ils pourraient alors faire un usage frauduleux de ces boissons, il faut qu’il y ait toujours une identité parfaite entre le chargement et l’expédition. Et bien que, par la nature de leur commerce, ces assujettis soient de véritables marchands en gros, le ministre des finances a décidé que ceux d’entre eux qui effectuent leurs transports à dos de bêtes de somme, n’acquitteraient pour le prix de la licence que le minimum du tarif; mais ceux qui se servent de charrettes. ]]

Source : grande Encyclopédie

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